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pectueux de la parole donnée, ont affirmé leur volonté agissante de rétablir le principe des nationalités.

Et c’est ainsi que, pour avoir voulu asservir le monde, les Allemands ont provoqué la liquidation complète et définitive de tous les attentats, commis par eux contre le droit qu’ont les peuples de disposer d’eux-mêmes. Il ne s’agit plus, à l’heure actuelle, d’un conflit limité à deux puissances rivales. C’est l’opposition de deux théories, celle de la force primant le droit et celle de la liberté des groupemens ethniques et nationaux qui domine la grande guerre et trouvera sa solution intégrale dans la paix imposée par les Alliés aux naufrageurs germaniques. Polonais, Tchèques et Moraves, Yougo-Slaves, Italiens et Roumains voient, après des siècles d’esclavage, poindre à l’horizon l’aurore de leur délivrance et saluent d’avance avec enthousiasme l’indépendance reconquise.

Les Alsaciens-Lorrains ne sont pas les derniers à se réjouir de l’écrasement de leurs persécuteurs. Depuis près d’un demi-siècle, ils attendaient avec impatience le retour à la mère-patrie. Ployés sous le joug le plus dur, ils n’avaient renoncé ni à leurs regrets, ni à leurs espérances. Leur fidélité à la France, momentanément absente de leurs foyers, trouvera sa juste récompense dans la restauration prochaine du droit indignement violé par un vainqueur sans pitié.

Il est utile de le rappeler, Bismarck avait prévu que l’annexion de nos deux provinces à l’empire germanique s’opposerait à tout rapprochement entre la France et l’Allemagne. L’état-major prussien lui força néanmoins la main. De Moltke voulait, à tout prix, pouvoir constamment menacer Paris de la crête des Vosges et des bastions de Metz.

Ce que le chancelier de fer avait redouté devait se produire. La France humiliée et meurtrie n’oublia pas la mutilation de son territoire et, prévoyant de nouvelles exigences et de nouvelles agressions, elle se prépara, non pas à la guerre de revanche, mais à la guerre de défense, qu’instruite par des événemens tragiques, elle voyait venir. L’Allemagne, pour garder le bien mal acquis, se vit elle-même entraînée à des armemens ruineux. De part et d’autre, sans en convenir, on chercha des alliances qui, toutes, étaient dominées par le souci ou de