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dans les prévisions normales, puisque le principal obstacle au développement complet de son effort a disparu avec la menace que faisait peser sur ses communications essentielles la germanophilie exaspérée d’un souverain déchu. Oserai-je dire ici qu’il conviendrait de profiter des quelques semaines qui nous séparent de l’automne pour donner en abondance au général en chef de cette armée tous les moyens d’action qu’il réclame depuis si longtemps ? Je vais plus loin, et je me demande pourquoi les Alliés marchanderaient à réclamer de l’Italie un effort considérable de ce côté-là. J’entends bien toutes les objections de l’ordre purement politique que l’on m’opposera au lendemain de la mainmise, si leste, de nos entreprenans alliés sur l’Albanie et sur une partie de l’Epire. J’avoue que tout cela me paraît de bien faible importance à côté de l’inestimable avantage d’atteindre la ligne Philippopoli-Sofia-Nisch et, qui sait ? de tendre la main aux Roumano-Russes, après avoir décidément mis hors de cause l’armée bulgare. Comme le disait fort bien ici même, il y a quinze jours, M. Charles Benoist : « Jusqu’à ce qu’elle se pose internationalement, l’affaire albanaise se présente comme une affaire italienne d’ordre intérieur. »

Quand donc comprendra-t-on qu’il n’y a qu’une seule chose qui compte en ce moment : c’est d’abattre l’Allemagne le plus tôt possible, et que tous les intérêts particuliers trouveront leur satisfaction dans celle de cet intérêt général et essentiel ? Or, qui pourrait douter que l’on viendra plus vite à bout de l’Allemagne, — confondue, n’est-ce pas ? avec son satellite l’Autriche, — en portant l’attaque principale au Sud, sur le front macédonien ? Ni celui du Carso, ni celui du Trentin ne sauraient, en dépit de l’héroïsme des troupes italiennes et de l’habileté de leur chef, fournir aux Alliés le théâtre de l’opération décisive. Il suffit donc, là, d’une défensive-offensive vigoureuse. Trente et Trieste n’en reviendront pas moins pour cela au noble peuple qui aura fait tant d’efforts pour les rendre à la liberté.

Des considérations analogues pourraient nous conduire, — et conduisent en ce moment, je crois, beaucoup de personnes, — à préconiser l’emploi du même système de guerre sur le front occidental. J’ai dit déjà, au commencement de cette étude, pour quelles raisons de haute portée je ne saurais adopter cette manière de voir.

Mais il faudrait s’entendre et d’abord distinguer entre les