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Il ne peut être question dans cette étude, — qui n’a qu’une portée générale, — de discuter les raisons que les esprits timorés font valoir pour que l’on reste dans le statu quo en ce qui touche l’action des forces navales et la combinaison éventuelle de cette action avec celle des forces de terre. Dans cet ordre d’idées, toutes les propositions fécondes ont toujours été combattues avec acharnement, toutes les grandes entreprises ont failli avorter devant l’émoi des « conseils autorisés, » devant la répugnance instinctive de ceux-là même à qui incombait la charge de conduire ces entreprises à bonne fin et qui, mis au pied du mur, l’ont parfaitement franchi [1].

Ne cherchons d’ailleurs pas davantage — ce ne nous serait pas permis — à définir d’une manière précise toutes les opérations qui peuvent être exécutées avec de raisonnables chances de succès sur ce front Nord. J’observerai seulement, pour répondre à des préoccupations extrêmement vives, qu’il ne saurait être question de donner aux grandes unités de combat, aux trop précieux dreadnoughts, un rôle actif dans tout ce qui touche à l’attaque des ouvrages de côte, ni de leur imposer sans des précautions minutieuses, déjà étudiées par les spécialistes, un séjour de quelque durée dans des eaux parcourues par les sous-marins [2].

Non ; le rôle tout indiqué de ces bâtimens de haut bord et d’énorme déplacement est de se tenir en réserve, à quelque

  1. Un exemple remarquable et assez peu connu de cette mentalité spéciale est celui de l’amiral Duperré qui, ainsi, du reste, que toute l’amirauté française, ou à peu près, combattit énergiquement et jusqu’au dernier moment l’expédition d’Alger de 1830, ce qui ne l’empêcha pas de la diriger fort bien. Mais l’amiral voulait « dégager sa responsabilité, » en cas d’échec.
  2. Je me propose d’étudier prochainement la question des blocus maritimes » qui me semble obscurcie par les préjugés tenaces de marins qui ne veulent pas se rendre compte de la valeur des moyens nouveaux que la guerre moderne met à leur disposition à ce sujet.