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et qui comprend un hôpital et des infirmeries. La cavalerie asiatique est parquée à La Valentine et à La Barasse, l’infanterie au Parc Borély. A Santi et à Carcassonne, à Bonneveine enfin, on a construit des cantonnemens pour l’infanterie anglaise. Sur les boulevards extérieurs, le camp Fournier reçoit un dépôt de cavalerie. Et constamment, dans le port de la Joliette, des navires ancrés et prêts à partir constituent de véritables casernes flottantes.

Il est certain que ces troupes jetées du jour au lendemain, et par milliers, sur le pavé de Marseille, y ont causé d’abord un certain brouhaha et même quelque confusion. Mais petit à petit tout s’est tassé et arrangé. A part certaines excentricités un peu vives, comme il s’en commet dans toutes les villes de garnison, les soldats et les officiers anglais ont tenu à donner à leurs hôtes un parfait exemple de correction et de discipline.

Puis, les jours succédant aux jours, à mesure qu’une intimité plus étroite s’établissait entre l’indigène et l’étranger, la cordialité britannique a prouvé qu’elle ne le cédait point, en chaleur de paroles et de sentimens, à la cordialité provençale. Le maire de Marseille, M. Eugène Pierre, me disait qu’il avait reçu, à l’occasion du dernier nouvel an, avec les vœux très amicaux du commandant anglais, des protestations enthousiastes de gratitude, d’attachement et de patriotisme marseillais. Ce même officier supérieur, le très distingué et très aimable colonel T., à qui je parlais de l’armée anglaise, me répondit avec une charmante vivacité :

— Il n’y a pas d’armée anglaise : il y a l’armée franco-britannique !

Comment s’étonner qu’avec ces façons courtoises et fraternelles, et aussi avec leur prodigalité bien connue, les Anglais soient très populaires, non seulement parmi les commerçans, mais dans toute la ville ? Leurs officiers y entretiennent une animation, une gaîté, un train de vie, qui ont permis à Marseille de traverser, sans trop s’en apercevoir, les heures les plus sombres de cette guerre. Leurs troupes asiatiques sont un des grands spectacles pittoresques de la rue marseillaise et la joie des badauds.

Quand les Allemands jettent à la tête de ces Orientaux l’épithète de « barbares, » c’est bientôt dit, en vérité. Ce qu’il