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industrielle, au milieu des pires difficultés économiques, d’avoir donne l’exemple du travail, de l’esprit d’initiative et d’organisation, quand ailleurs on pataugeait dans le gâchis, on s’enlisait dans la paresse et la routine ? Que Marseille se soit enrichie, c’est évident. Mais demain, après la paix, le pays n’aura jamais trop de capitaux disponibles. Aujourd’hui même, il en a besoin pour se refaire, pour relever les ruines des régions dévastées : c’est à quoi contribuera sans doute l’Œuvre de la Provence pour le Nord, dont le Comité à peine formé a déjà réuni deux millions et dont les ressources vont sans cesse en s’augmentant...


A côté de ces campemens ouvriers et, un peu partout, dans les faubourgs et dans la banlieue marseillaise, s’essaiment les campemens militaires, beaucoup plus nombreux et, en général, aussi vastes que les précédens. Troupes françaises, troupes britanniques et alliées, permissionnaires de l’armée métropolitaine, de l’armée d’Afrique, ou de l’armée d’Orient, occupent de véritables territoires, qu’il a fallu, comme pour les travailleurs coloniaux, aménager aussi rapidement que possible.

Les cantonnemens de l’American Park et du Skating de l’Exposition représentent la plus considérable de ces agglomérations militaires : deux mille cinq cents, trois mille hommes, quelquefois même jusqu’à quatre mille, y sont abrités et nourris journellement. Ces hôtes sont des nomades qui ne font que passer. Ils s’arrêtent ici sur la route de Salonique, d’Alger ou du Caire. Le campement en reçoit de cinquante-cinq à soixante mille par mois : c’est la grande étape entre les deux fronts. Bien que les métropolitains y foisonnent, les coloniaux, les indigènes d’Afrique et d’Indo-Chine forment le gros des contingens. Même bigarrure de blancs, de jaunes et de noirs que dans les baraquemens des manœuvres. Joignons-y des Yougo-Slaves et, — détail significatif, qui requiert nos réflexions, — des engagés volontaires japonais. Mais si spacieux que soient ces locaux, ils n’ont pas tardé à devenir insuffisans. Il a fallu en créer d’autres. Le camp de la Delorme et les cantonnemens des Nouvelles Facultés, sur la place Victor-Hugo, proche la gare centrale, se sont ouverts aussi pour abriter, outre les détachemens de la garnison, des troupes de passage, surtout celles