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leur repli, les troupes du roi Albert s’écoulaient vers le Sud-Ouest, sans paraître même penser qu’elles pussent s’arrêter avant d’avoir atteint le territoire français où elles se reconstitueraient. Elles étaient, le 11, parvenues dans la région Thourout-Ostende, et déjà, par sa 6e division, l’armée belge atteignait les environs de Dixmude, mais avec l’évidente intention de continuer la retraite sur Calais. « Nous sommes des morts vivans [1], » disaient-ils.

Il semblait au haut commandement français que l’armée belge serait avantageusement dirigée sur la région Ypres-Poperinghe où elle serait en liaison immédiate avec les forces anglaises et françaises. A cette même heure, répondant au désir de tous, le roi Albert qui, dans ces circonstances, déployait de si rares qualités de cœur et d’intelligence, faisait savoir qu’il « serait heureux de recevoir les instructions du général Joffre au même titre que l’armée anglaise, » et se prêtait ainsi entièrement à la « coordination » que le général Foch avait, on le sait, mission d’établir entre les efforts de tous. Les cinq divisions disponibles seraient réunies « dans la région de Nieuport-Furnes-Dixmude, » cette concentration étant couverte par les élémens anglo-franco-belges qui avaient protégé la retraite : la 7e division de cavalerie française était par surcroît portée à Ypres pour établir une liaison avec les forces belges, la division Rawlinson ralliant, par Roulers et Ypres, l’armée du maréchal French.

L’armée allemande ne s’était pas attardée à Anvers. Les avant-gardes se fussent jetées aux trousses de l’armée belge si elles ne se fussent, dans les environs de Gand, heurtées aux alliés couvrant la retraite. Mais, dès le 14, on signalait que l’armée de siège rendue disponible, — 40 000 à 50 000 hommes, — marchait, en trois colonnes, de Gand par Bruges sur Ostende, de Deynze par Thielt sur Roulers et d’Audenarde par Courtrai sur Menin. Ce jour-là, les Belges atteignaient les bords de l’Yser et s’y arrêtaient.

A peine s’étaient-ils arrêtés qu’il était sensible que « leur moral se relevait. » On était d’ailleurs bien résolu à assurer la droite belge, ce dont l’amiral Ronarc’h se chargerait. D’autre part, et pour protéger leur gauche, on demandait la coopération de l’escadre britannique, en attendant qu’une division

  1. Pierre Nothomb, Revue des Deux Mondes, 15 septembre 1916.