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A travers ce pays relativement boisé, — les gens du Noordland l’appellent « le pays des bois, » — le canal d’Ypres, qui n’est que l’Yperlée canalisé, tend du Nord au Sud sa ligne droite d’eau pâle. Il unit l’Yser à la Douve. Cette riviérette coule lentement de l’Ouest à l’Est au Sud d’Ypres jusqu’à Warneton où elle se jette dans la Lys.

C’est la Lys qui, très nettement au Sud, délimite le champ de bataille flamand : issue des collines de l’Artois, elle va, après Merville, Estaires, Aire, Armentières, Warneton, arroser Werwicq, Menin et Courtrai. C’est un médiocre cours d’eau, mais, grâce à la nature du sol, il s’est creusé une vallée qui, écrit avec raison M. Vidal La Blache, « étonne par sa largeur. »

Ce fossé borne l’arène où tiendra notre bataille des Flandres, les combats se poursuivant d’ailleurs entre Arras et Lille.

Si, de la mer du Nord à la Lys, les élévations sont nulles ou médiocres, les rivières étroites et lentes, et rares les bois, les villages sont abondans. Guichardin écrivait au XVe siècle que la Flandre « n’est qu’une ville continue. » Telle impression ne résulte pas, dans sa rigueur, du spectacle qu’offre la région située à l’Ouest de l’Yser et de l’Yperlée : il n’en est pas moins vrai que tout le long des chaussées élevées de nombreux villages, — les ham, — s’allongent au-dessous de leurs kerke (églises) sans parler des fermes, — hofstede, — qui sont de vrais hameaux sur chaque monticule : Saint-Georges, Saint-Pierre-Cappelle, Shoore, Kloosterhoeke, Keyem, Beerst, Vladsloo, Stuywekenskerke, Oostkerke, Caeskerke, Saint-Jacques-Cappelle, Woumen, Clercken, Houthulst, Staden, Merkem, Westroosbeke, au Nord et au Sud de Dixmude, et autour d’Ypres, Noordschoote, Zuydschoote, Elverdinghe, Boesinghe, Bixschoote, Pilken, Langemark, Poelcapelle, Paschendaele, Saint-Jean, Zonnebeke, Zillebeke, Gheluvelt, Bacelaere, Dardizele, Gheluve, Kruiseik, Zandwoorde, Vormizeele, Hollebeke, Houthem, Messines, Comines, etc. — noms qui vont devenir familiers au lecteur, villages dont vingt tiennent à la fois dans le regard de l’observateur qui, d’un moulin à vent ou de quelque clocher de kerke, embrasse un peu d’horizon. Car kerke et moulins sont dans le Noordland, — avec quelques hautes cheminées de briqueterie, — les seuls observatoires ; c’est ce qui a fait leur infortune : la plupart des villages ne présentent plus dans la zone de la bataille que des amas de ruines d’où, çà