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sont peu à peu établis sur le front. Rien que la formation des comités de compagnies a retiré de la zone active de guerre plus de 30 000 hommes qui ont passé à l’arrière du front avec les états-majors, les réserves et les auxiliaires.

Les officiers ont eu beaucoup à souffrir du fait de cette dernière institution. Chargés de toute la responsabilité et privés des droits correspondans, ils n’osent donner un ordre dans la crainte de le voir discuté ou enfreint. Tous ceux d’entre eux qui le peuvent passent dans les cadres de la réserve et, sans la guerre, ils donneraient en masse leur démission. Au début de la Révolution, se montrer dans la rue constituait, pour un officier de terre ou de mer, un acte de courage : « Nous préférerions être tués par les balles allemandes ! » disaient-ils. Ce danger a disparu, mais un officier risque à chaque instant d’être blessé dans sa dignité d’homme ou de soldat.

La plus grande confusion règne dans les casernes : des mitrailleurs se sont trouvés, on ne sait comment, chez les fantassins ; des cavaliers de Krasnoïé-Sélo ont échoué dans une des milices, où ils vivent pêle-mêle avec les miliciens ; le 2) mitrailleurs d’Oranienbaum a pris possession de l’Ecole des Ingénieurs où il a fallu établir pour lui un poste de ravitaillement.

Les résultats désastreux et foudroyans de l’ordre n° 1 ne tardèrent pas à épouvanter même le Conseil. Par le pricaz n° 2, il rappela les soldats à l’ordre, à la tenue et à la discipline. Mais le mal était déjà profond. Après des jours de complète licence, de promenades et de flâneries désordonnées à travers la ville, quelques patrouilles commencent à sortir. La foule s’arrête et regarde, étonnée. Le contraste est si grand, entre les uniformes soigneusement ajustés, l’allure martiale d’autrefois et le laisser aller, la démarche paresseuse d’aujourd’hui !... Sont-ce là les armées héroïques des champs de la Prusse orientale, des campagnes de Pologne et de Galicie ? Sont-ce là les soldats de la Révolution ?


L’ORDRE DANS LA RUE. — LA JOURNÉE D’UN MILICIEN

Un jeune homme monte la garde dans notre rue. Il est vêtu d’un uniforme d’étudiant noir à pattes bleues et, à boutons de cuivre, et il porte un brassard avec les lettres GM. peintes en rouge sur fond blanc. Cela signifie Gorodskoïa Militri, Milice