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lui en avait coûté de voir le vicomte Kato se séparer du Cabinet en 1915, évidemment parce que ce Cabinet n’était pas en mesure, malgré les doctrines et l’autorité de son chef, d’appliquer la politique résolument parlementaire. En se retirant à son tour le 2 octobre 1916, le marquis Okuma rendit hommage à son passé et justice au vicomte Kato, en proposant à l’Empereur le nom de ce dernier pour lui succéder comme président du Conseil. Mais les « genro, » s’ils avaient pu, au printemps de 1914, dans une crise presque inextricable, se résigner à conseiller au souverain de faire appel, malgré ses convictions bien connues, au comte Okuma, qui était le seul homme d’Etat capable de rétablir une situation compromise, n’étaient aujourd’hui nullement disposés à indiquer à l’Empereur, pour la présidence du Conseil, le nom de l’homme politique qui représentait par excellence, et plus que le marquis Okuma lui-même, la doctrine parlementaire, le système des Cabinets homogènes et de parti, soutenus par la majorité de la Chambre basse. Ils n’hésitèrent pas, au contraire, à désigner comme le plus apte à recueillir la succession du pouvoir le chef reconnu de la tradition bureaucratique et de gouvernement étranger et supérieur aux influences des partis parlementaires. Leur candidat fut le maréchal Teraoutsi, l’ancien ministre de la Guerre, présentement gouverneur général de la Corée, homme d’État de premier ordre, d’ailleurs, et hautement digne de prendre sa place à côté des Ito, des Saionji, des Katsura, dans la lignée des grands conducteurs et maîtres de la politique japonaise.

Le 9 octobre, le Cabinet Teraoutsi était constitué : le maréchal y assumait, avec la présidence du Conseil, l’intérim du ministère des Finances ; le vicomte Motono, ambassadeur à Pétrograd, y recevait le portefeuille des Affaires étrangères ; les barons Goto et Den, MM. Okada, Matsumuro, Nakashoji étaient nommés ministres de l’Intérieur, des Communications, de l’Education, de la Justice, de l’Agriculture et du Commerce, le lieutenant général Oshima et le vice-amiral Kato restant titulaires des ministères de la Guerre et de la Marine. C’était là un gouvernement fort par les capacités et les talens des membres appelés à en faire partie, et particulièrement propre, par les personnes de son chef et de son ministre des Affaires étrangères, à inspirer confiance aux trois grandes Puissances alliées de la première heure, la France, la Grande-Bretagne, la