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s’était assigné comme son premier devoir. Je n’ai pas à redire ici la façon magistrale dont en deux mois une escadre et une armée japonaises, assistées de quelques bâtimens britanniques et du petit corps anglais du major-général Barnardiston, réduisirent la forteresse allemande qui capitula le 7 novembre avec ses 222 officiers et 4 426 sous-officiers et soldats. Le 11, les vainqueurs faisaient leur entrée solennelle dans Tsing-tao, lavée et purifiée de la souillure allemande. Je n’ai pas à rappeler non plus comment la flotte japonaise, redevenue libre, acheva, avec les escadres anglaise et australienne, d’occuper toutes les colonies allemandes du Pacifique, l’archipel des Samoa, les Mariannes, les Marshall, les Carolines, et de purger les mers lointaines de la présence du pavillon germanique. Tandis que le dernier pirate allemand, l’Emden, allait se faire couler le 7 novembre par le croiseur australien Sydney, l’escadre allemande, composée de deux croiseurs cuirassés, le Scharnhorst et le Gneisenau, et de trois éclaireurs, le Nürnberg, le Leipzig, le Dresden, et qui avait dû évacuer le Pacifique, était attaquée et détruite le 8 décembre, à la sortie des détroits du Sud et à la hauteur des îles Falkland, par l’escadre anglaise du vice-amiral sir F. Sturdee, dont les canons eurent raison en quelques heures des cinq bâtimens ennemis. A partir de ce jour, sur les mers nettoyées et libres, le commerce des Alliés, le transport des troupes et des munitions eurent, par le Pacifique et l’océan Indien, une sécurité absolue. C’est aussi à cette date que le Japon, ayant terminé sa tâche militaire essentielle, put se consacrer, en faveur des Alliés et surtout de la Russie, à la fabrication intensive du matériel de guerre, des munitions, ainsi qu’à l’envoi des équipemens, vêtemens, chaussures, vivres, ravitaillemens de toute sorte, qui, lors de la retraite de Pologne, furent d’un si grand et si providentiel secours pour les armées du grand-duc Nicolas.

Le Japon s’était transformé en une vaste usine de guerre, en un immense atelier, pour subvenir aux besoins des Alliés. Les canons légers ou lourds, les obus de tout calibre, les fusils, les plaques de blindage, le cuivre, les harnachemens, les uniformes, les bottes fabriquées spécialement en Corée, les conserves de poisson, de viande et de légumes, le riz, toute cette quantité infinie de fournitures était expédiée par la voie du Transsibérien qui, certes, à l’origine, ne paraissait pas avoir