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passagers possible, afin de les empêcher de pénétrer en France par Marseille, Port-Vendres ou Cette, et priver ainsi notre pays du mouvement auquel ils donnaient lieu.

Nous avions eu, pour notre part, connaissance de ces agissemens ; nous nous en étions même rendu compte de visu ; mais quand nous en faisions respectueusement l’observation au gouvernement, on nous répondait par l’éternel : « Pas d’histoires ! »

Or, l’inconvénient de cette mainmise teutonne sur nos ports n’était pas seulement d’ordre commercial. Demandez-vous en effet quelles étaient ces escales choisies par les Allemands. C’était Cherbourg, Alger, Bizerte : Cherbourg, notre sentinelle dans la Manche ; Bizerte, arsenal d’avant-garde sur l’Adriatique ; Alger, la clef de nos possessions africaines ! Il n’est pas besoin de réfléchir longuement pour se rendre compte que le fait d’avoir toléré cette emprise allemande sur ces points spéciaux mérite plus que d’être taxé d’indifférence.

Au lendemain des hostilités le pays ne saurait permettre le retour d’un tel état de choses. Avec nos amis nous nous lierons par des traités de réciprocité ; nous aurons, à l’égard des neutres ? une attitude conforme à celle qu’ils auront observée pendant le conflit ; mais rien ne nous empêchera de barrer la route à nos ennemis sur le terrain économique, comme nous avons su le faire sur le champ de bataille de la Marne.

Ce devrait être, en effet, une règle absolue que l’accès des rades militaires fût interdit, sauf aux nations alliées. A l’égard de celles-ci, la Conférence interalliée du commerce, tenue à Rome le 17 mai, vient d’émettre le vœu suivant, dont nous ne saurions trop recommander la lecture : « Une entente devra intervenir entre les Alliés pour l’utilisation de leurs ports ou de leurs rades militaires, pour l’accostage, le mouillage et les escales des navires de commerce. Un accord devra également être conclu relatif aux droits de navigation à percevoir. Les Alliés s’engageront à abolir leurs conventions maritimes avec les neutres. Les services directs seront institués entre les chemins de fer et les lignes de navigation des nations alliées, qui se réservent, dans toute circonstance, de prendre les mesures de défense exigées par la situation contre la concurrence ennemie, laquelle ne manquera pas de se manifester après la guerre. Enfin, la Conférence attire l’attention des Alliés « sur l’opportunité