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s’efforcent de se syndiquer de façon à concentrer les commandes dans les maisons qui sont le mieux placées pour les exécuter. Les manufactures fermées recevront une indemnité de celles qui resteront ouvertes ; leur personnel passera tout entier au service de l’Etat, en vertu de la mobilisation civile.

Les Allemands essaient de maintenir leur influence chez les neutres qui n’ont pas les yeux encore suffisamment ouverts sur les dangers que les exécrables ambitions teutonnes ont fait courir à l’univers civilisé. Dans la gazette commerciale qui continue à paraître à Buenos-Ayres sous le titre de Handels Zeitung, nous voyons, à côté des réclames de la Banque allemande transatlantique, de la Banque germanique de l’Amérique du Sud, s’étaler de pompeuses annonces du Norddeutscher Lloyd, l’une des deux principales compagnies de navigation allemandes, dont pas un navire cependant ne circule sur les mers depuis le mois d’août 1914. Les fabriques de Berlin, d’Augsbourg, de Nuremberg publient des avis comme si l’Océan leur était ouvert et comme si elles étaient en mesure d’expédier leurs produits à leurs cliens. Jusqu’à la dernière minute, nos ennemis tenteront de faire croire que leur armature économique est intacte et feindront d’agir comme si, à la minute où cesseront les hostilités, leurs relations avec le reste du monde devaient d’elles-mêmes se rétablir sans difficultés.

Ils s’imaginent que chacun va leur redemander immédiatement les marchandises dont il avait coutume de s’approvisionner chez eux, et dressent un plan de constitution de stocks à cet effet. Ils comptent par exemple sur les produits chimiques, les matières colorantes, les appareils électriques, les sels de potasse. Nous ne savons ce que feront les neutres, dont le nombre diminue d’ailleurs chaque jour. Mais les efforts qui se poursuivent, au cours même des hostilités, chez nous et nos alliés pour organiser la fabrication d’une partie notable de ces objets, nous paraissent de nature à déjouer, sous beaucoup de rapports, les calculs que font nos ennemis. Ceux-ci comptent un peu trop naïvement qu’au lendemain de la paix tout reprendra son cours normal, que les échanges entre eux et nous redeviendront ce qu’ils étaient avant le 1er août 1914. Ceux d’entre eux (ils sont rares) qui ont gardé quelque clairvoyance avouent qu’un facteur essentiel de leur expansion d’antan leur manquera, celui des relations personnelles :