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l’Allemagne pour se rendre en Autriche, il serait arrêté.

Devant cette explosion de menaces, le ministre danois auprès de l’Empereur, M. de Quaade, « homme doux, timide et craintif, » courut à la Wilhelmstrasse pour fournir des explications et prévenir des mesures de rigueur. Mais le comte de Bülow, secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, refusa de le recevoir et maintint son refus, malgré les lettres et demandes d’audience qu’il recevait de l’infortuné diplomate. Celui-ci, de plus en plus terrifié, alla faire part de ses perplexités à lord Odo Russell, l’ambassadeur d’Angleterre, à qui sa qualité d’envoyé d’une cour parente, l’éclat de sa carrière diplomatique, son rang social, l’amitié de la princesse impériale et de son mari assuraient une influence, justifiée d’ailleurs par ses mérites et ses services. Il n’avait pas besoin d’être sollicité pour intervenir, venant de recevoir de la cour de Windsor des instructions relatives aux incidens dont M. de Quaade s’alarmait et qui déjà avaient eu des échos à Londres. La famille royale s’en était émue, et on invitait l’ambassadeur à faire ce qui dépendrait de lui pour obtenir que la menace d’arrestation ne fût pas suivie d’effet. Peut-être ce résultat pourrait-il être atteint si le Cabinet de Berlin voulait considérer le duc de Cumberland non comme un prince allemand, mais comme un prince anglais. Il suffirait que cette qualité lui fût reconnue pour le mettre à l’abri de mesures coercitives.

En entrant chez le secrétaire d’Etat Bülow, l’ambassadeur britannique fut accueilli par des paroles de colère contre le Danemark : « Le roi Christian nous a offensés, en donnant sa fille au duc de Cumberland au lendemain de la manifestation publique de ce révolté, blessante pour l’Empereur. Nous avons fait cependant bon visage, nous bornant à arranger les choses pour que les membres de notre légation ne fussent pas présens au moment des fêtes du mariage, et nous étions résolus à envoyer très prochainement M. de Heydebrand présenter ses lettres de rappel et son successeur M. de Magnus ses lettres de créance ; mais la réception faite à la députation guelfe est une insulte qu’il nous est impossible de subir en silence. Ne oubliez pas, mon cher ambassadeur, qu’après nous avoir donné longtemps des inquiétudes, le Hanovre est aujourd’hui l’une de nos meilleures provinces et que toute sa population est sincèrement ralliée à l’Empire, à l’exception d’un polit groupe de politiciens, d’ambitieux,