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Le mariage, célébré à la date indiquée, à huit heures du soir dans la chapelle du palais de Christiansborg, conserva le caractère d’une fête de famille. Cependant, le grand-duc Alexis y représenta l’empereur de Russie et annonça l’arrivée prochaine d’une députation du régiment de dragons russes dont Christian IX était colonel honoraire. Ce régiment, maintenant en garnison au Caucase, s’était fait remarquer dans la guerre contre les Turcs, et l’empereur Alexandre avait voulu qu’il fût rendu compte au Roi des distinctions dont « ses dragons » avaient été l’objet pendant la campagne. A Copenhague, cette marque de courtoisie du Tsar et la présence d’un grand-duc aux fêtes du mariage furent considérées comme une réponse du Cabinet de Saint-Pétersbourg aux procédés de l’Allemagne. Assistaient encore aux noces quelques Hanovriens envoyés en députation par les anciens partisans de Georges V, résidant en Hanovre, devenus les amis fidèles de son fils et considérés par le gouvernement allemand comme u des rebelles persévérant dans un état d’insurrection latente et de protestation déclarée contre l’Empire. » C’est en ces termes que la presse de Berlin les qualifiait en annonçant leur arrivée à Copenhague. Toutefois, elle ne semblait pas encore en prendre ombrage. Elle reproduisait d’après les journaux danois, sans commentaires, sinon tout à fait sans aigreur, les détails de la cérémonie, décrivait les toilettes, énumérait les télégrammes de félicitations adressés au roi Christian par les diverses cours, parmi lesquels s’en trouvait un du maréchal de Mac Mahon, président de la République française. Mais l’accent changea et s’aggrava lorsque, à Berlin, on apprit que la « députation guelfe » avait été reçue par le Roi, et plusieurs de ses membres invités à dîner par le ministre des Affaires étrangères, sous le prétexte d’anciennes relations d’amitié.

La cour et le gouvernement allemand, au reçu de cette nouvelle, manifestèrent une colère bruyante. Elle s’envenima, lorsque le bruit se répandit que plusieurs Hanovriens avaient reçu des décorations. Ce ne fut toutefois qu’au bout de quelques jours, le 31 décembre, que les gazettes officieuses et officielles furent autorisées à se faire l’écho de ces griefs. Elles y mirent d’abord une sorte de modération. Mais ce n’était plus seulement le duc de Cumberland qu’elles incriminaient, c’était le Danemark lui-même, accusé formellement » de favoriser les intrigues