Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 39.djvu/802

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’AItenkirchen, et à l’Est au-dessus du fond de la Horgne où la tranchée de Saales qui joint la batterie de Damloup à Damloup est pour la plus grande part occupée, l’artillerie lourde écrase sans discontinuer le fort et ses entours de la masse de ses 155 et de ses 220. Un déluge de fer rend à l’ennemi la région inhabitable : tirs de harcèlement sur tous les abords, tirs de barrage sur toutes les voies d’accès, tirs d’interdiction dans le fond du ravin de Fumin et sur la route de Damloup à Vaux, tirs de destruction enfin sur le fort et sur le village. La riposte de l’adversaire, d’abord redoutable, va en diminuant : il a tenté de résister à notre domination, il la subit en grondant, elle redouble ses coups, il cède. Cette lutte d’artillerie dure sans interruption du 28 octobre au 2 novembre.

Le 2 novembre, la disproportion est si manifeste que le commandement juge le moment venu de porter le coup décisif. Sans doute le fort peut encore se défendre : l’infrastructure doit garder des parties intactes et, dans des conditions aussi défavorables, le commandant Raynal et ses hommes, débordés et cernés, ont tenu et n’ont été forcés que par la soif. Mais la ténacité est devenue vertu française. L’attaque est fixée au 3 novembre, dans la journée. Cependant les événemens se précipitent : le 2 au petit jour, nos observateurs signalent des mouvemens de troupes en arrière du fort ; ces troupes, au lieu d’approcher, s’en vont. Il y a donc une évacuation, tout au moins partielle, du fort. Des explosions y sont, un peu plus tard, signalées. Enfin le radiogramme allemand annonce lui-même, dans l’après-midi, l’évacuation totale.

Le général décide de brusquer l’occupation. Elle se fera dans la nuit du 2 au 3 novembre, mais sera précédée d’une reconnaissance qui se rendra compte des lieux. Contraint d’abandonner un pareil point d’appui qui nous donne barre sur la Woëvre et qui fut le théâtre de l’un de ses succès les plus longuement disputés, les plus sanglans, les plus célèbres, contraint d’avouer par là sa renonciation définitive à toute entreprise nouvelle sur Verdun, l’ennemi a pu nous tendre un piège, tout au moins céder un terrain miné.

Le capitaine de Persan, de l’état-major de la division Andlauer, est envoyé, porteur des ordres, au lieutenant-colonel Hauw commandant le 298e régiment alors en réserve de division. Le 298e, dont les contingens solides et opiniâtres viennent