aux armées. C’est Léopold Hugo qui raconte à son fils le combat de Talaveyra [1], en Espagne ; mais c’est l’oncle Louis qui fait à Victor et à ses frères le récit du Cimetière d’EyIau. La part d’hérédité est ici incontestable. Il y a autre chose que des images dans la pièce intitulée : Mon enfance, — la » crèche » posée sur un tambour, les « langes du berceau) faits des lambeaux d’une bannière usée, — il y a une part de vérité. Pendant son séjour à Avellino, en 1807, son père le fit inscrire sur les contrôles du régiment de Royal-Corse. « J’ai été enfant de troupe, écrit-il dans une lettre à Charles Hugo du 18 décembre 1869. J’ai une vieille sympathie pour l’armée. J’ai écrit quelque part :
J’aime les gens d’épée, en étant moi-même un.
Tout enfant il a aimé « les crinières flottantes des coursiers, »
admiré le panache blanc des lanciers, « le casque gépide » des
dragons, suivi « le vol des drapeaux triomphans. » il a eu pour
premier hochet « le nœud d’or d’une épée ; » il a rêvé parfois
qu’il « saisissait le glaive » de son père. A sept ans, il ne parle
que « guerre, assauts et batailles » et souhaite de verser pour
une noble cause les flots de « son sang jeune et pur. » Plus tard
il a des gestes de soldat, en détente brusque, qui décèlent l’atavisme paternel. Lorsqu’en février 1827, au cours d’une réception à l’ambassade d’Autriche, et sur la suggestion du Cabinet
de Vienne, le maréchal Oudinot, duc de Reggio, et le maréchal
Soult, duc de Dalmatie, se voient infliger l’affront de s’entendre
annoncer sans leurs titres de noblesse napoléonienne, « son
sang de soldat ne fait qu’un tour, » et il écrit l’ode A la colonne de la place Vendôme. En 1840, le conseil municipal de
la ville de Paris refuse de donner six pieds de terre, dans le
cimetière du Père-Lachaise, pour le tombeau de la veuve de
Junot, ancien gouverneur de Paris, et le ministre de l’Intérieur
refuse également un morceau de marbre pour ce monument.
C’est Hugo, c’est « le fils du soldat » qui relèvera l’insulte,
chantera « le chant expiatoire » et ensevelira en des vers
mélancoliques la mémoire de la noble femme. Pendant le siège
de Paris, le 9 décembre, il manifeste son intention de sortir
- ↑ Toute la Lyre, I, 2.