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Marseille, risquaient de désorganiser le service de la navigation française [1]. Ces conflits se sont renouvelés à la veille de la mobilisation. On comprendra pourquoi je ne veux pas revenir sur ces faits ; je ne les rappelle que pour montrer combien il est opportun de régler le statut des équipages, afin que dans l’avenir les incidens qui ont marqué le départ de certains navires ne se produisent plus. Ces incidens, la chose est évidente, seraient de nature à faire perdre aux navires français leurs meilleurs abonnés. Les passagers, craignant que le navire ne parte pas à la date annoncée, préféreraient, en effet, voyager sous pavillon étranger plutôt que sur nos lignes et j’ai déjà parlé du dépit attristé de ces Américains, arrivés le matin même par le train transatlantique, et qui apprenaient au sortir de table que leur départ pour New-York était ajourné sine die par suite du mauvais vouloir d’un soutier !...

Au nom de cet esprit de concorde auquel je faisais appel au début de cette étude, il est indispensable de se mettre d’accord sur un texte qui tienne compte des desiderata de chacun. Si l’on se pénètre des nécessités du service à bord, la rédaction en sera facile ; que l’on se hâte surtout ; rien n’est plus déplorable qu’une législation pénale inappliquée ; et j’entrevois une menace grosse d’orage dans la caducité d’un code tellement battu en brèche par les administrateurs des quartiers, par les autorités maritimes, par le Parlement enfin, qu’il n’en reste plus rien que de mornes pages, bonnes tout au plus à allumer le feu de la Saint-Jean.

La refonte du décret-loi de 1852 est à l’étude ; mais cette étude semble si laborieuse que nous désespérons presque d’en jamais voir la fin En effet, par un arrêté du 16 mars 1905, M. Gaston Thomson, qui avait succédé à M. Pelletan à la tête du département de la Marine, chargea une commission ministérielle de préparer cette révision. Les travaux de la commission, qui devait recueillir l’avis des associations d’armateurs ou de marins, aboutirent, à la fin de l’année 1909, c’est-à-dire au bout de cinq années, à l’élaboration d’un texte complet qui fut modifié par M. Chéron alors sous-secrétaire d’Etat à la Marine et soumis sans délai au Conseil supérieur de la Navigation.

Appelé à se prononcer sur les dispositions de ce projet, le

  1. Voyez la Revue du 1er novembre 1909.