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Non pas que ces canonnières (j’entends surtout les quatre de première classe, bonnes solutions du problème posé alors) dussent fournir un type définitif ; elles avaient deux graves défauts : leur tirant d’eau était encore trop fort et leur armement était exclusivement constitué par des bouches à feu à trajectoire tendue, alors que les pièces donnant des feux courbes sont les plus efficaces contre les ouvrages à terre. Mais enfin la pensée directrice était juste et la réalisation de cette conception répondait suffisamment aux besoins de l’époque[1].

C’est autre chose, quoique dans le même ordre d’idées, qu’il nous eût fallu aujourd’hui. Je définirai d’une manière générale le type qu’il conviendrait d’adopter en l’appelant : le radeau automobile armé d’un obusier à grande puissance. Il y a, depuis longtemps déjà, des propositions faites à ce sujet, et j’ai sous les yeux une solution du problème qui paraît satisfaisante, — « mise au point » réservée, — mais dont l’adoption me semble douteuse quand je vois qu’elle est signée du nom d’un simple architecte. Peu importerait d’ailleurs à qui ne se préoccupe que de l’intérêt général, si l’on pouvait espérer que des plans d’engins de ce genre, dus à des ingénieurs officiels, fussent en cours d’exécution. Cela est encore possible ; j’en doute cependant, reconnaissant que la dépense serait inutile si l’on est parfaitement décidé, quoi qu’il arrive, à ne jamais faire d’opérations méthodiques contre les côtes.

Quoi qu’il en soit, je rappelle à mes lecteurs que le principe de l’emploi contre les ouvrages à terre de bâtimens de très faible tirant d’eau et porteurs d’une artillerie puissante a été sanctionné par la décision de l’Amirauté anglaise d’envoyer aux Dardanelles, après la journée malheureuse du 18 mars 1915, des unités rapidement construites et appartenant au type « monitor. » On sait aussi que ces navires spéciaux n’eurent pas réellement l’occasion de donner leur mesure.

Où sont employées en ce moment les unités dont il s’agit ? Je l’ignore. Il serait aisé, en tout cas, de les ramener dans le Nord, d’où elles venaient. Et à ce propos, j’observe que tous les

  1. L’armement en canons de 24 et 27 centimètres à grande longueur d’âme et trajectoire tendue était justifié, en fait, parce qu’il s’agissait d’attaquer des ouvrages protégés par des voussoirs en fonte dure Grusoh. Mais ce type de batteries de côte n’a été adopté que pour la défense des eaux intérieures de l’estuaire de la Weser qui se confond avec celui de la Jade.