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À bord de la Provence. Le 11/24 zovembre 1916.

A Monsieur le Président du Conseil, Athènes.

« Monsieur le Président,

« Par votre lettre du 9/22 novembre, vous m’exposez, en réponse à ma lettre du 3/16 novembre, l’état comparatif du matériel de guerre qui appartient à la Grèce et qui est actuellement en la possession des forces de terre ou de mer soit des Puissances de l’Entente, soit des Puissances centrales. — Après m’avoir rappelé l’attitude de conciliation que le gouvernement dont vous êtes le président a montrée depuis qu’il est au pouvoir, vous me faites connaître que, néanmoins, ce gouvernement oppose le refus le plus catégorique à la demande du gouvernement français. Vous assurez que l’acceptation de cette demande constituerait une flagrante violation de la neutralité de la Grèce et que l’opinion publique du pays ne tolérerait pas de voir l’armée démunie de ses armes et mise dans l’impossibilité de défendre ses intérêts vitaux si jamais dans l’avenir ils venaient à être mis en danger. Vous exprimez enfin l’espoir que je reconnaîtrai le bien fondé du refus du gouvernement royal grec.

« Je suis d’accord avec vous quand vous dites que le gouvernement royal grec a récemment montré en plusieurs occasions son esprit de conciliation et vous savez que je suis, moi aussi, inspiré du plus vif désir de dissiper tout malentendu entre nous. Je suis cependant obligé de faire observer que le refus catégorique que vous opposez aux demandes du gouvernement français n’est pas inspiré de la neutralité bienveillante, dont le gouvernement royal grec a toujours donné l’assurance et dont il avait l’occasion de donner la preuve.

« Je peux difficilement admettre, d’un autre côté, que l’opinion publique d’un pays aussi éclairé que la Grèce regarde comme intolérable l’idée de céder aux Puissances, auxquelles il affirme sa neutralité bienveillante, une quantité d’armes et de munitions qui se trouve, non pas entre les mains de son armée, mais dans ses dépôts, complètement inutilisées. L’Entente n’a nullement l’intention de désarmer le pays et de l’empêcher de défendre ses intérêts vitaux. Il y a, sur ce point, une certaine confusion, qu’une partie de la presse et des gouvernans grecs