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faire remettre en culture quelques-uns des plus maigres terrains laissés à l’état de pâturages depuis la période 1870-1880. Cette proposition écartée, ainsi que celle d’organiser en Irlande des prêts d’outils et de machines, les agronomes officiels se bornèrent à donner des conseils/pour une exploitation plus intensive. De fait, la superficie consacrée au blé a diminué cette année de 8 à 9 pour 100 ; mais le Royaume-Uni n’est pas en danger de manquer d’aucune céréale, les stocks étant aujourd’hui dans ses ports ce qu’ils étaient à pareille date il y a deux ans.

Si la bière a enchéri de près de 50 pour 100, la hausse de l’orge, du sucre, l’exportation du malt y sont pour quelque chose ; l’impôt y est pour beaucoup. Le Parlement n’a pas hésité à le tripler à la fin de 1914, le portant à 18 francs par hectolitre sur cette boisson nationale ; ce qui d’ailleurs procure à l’Etat une recette de près de 800 millions de francs, la consommation n’ayant décru, malgré la surtaxe nouvelle, que d’un vingtième — 2 850 000 hectolitres.

Le vin seul a fléchi ; quant à l’alcool, quoique le gouvernement ait réquisitionné 30 pour 100 de la production et se prépare à augmenter cette proportion, il serait exagéré de dire que les marchands de boissons alcooliques et leur clientèle aient été sacrifiés aux intérêts généraux de la nation dans la plus faible mesure. Il est vrai que le whisky avait doublé de prix, au moment du dépôt par le ministère de propositions restreignant la vente et établissant des droits élevés ; mais ces projets ne furent pas maintenus et le triomphe des alcooliques fut éclatant, puisque la consommation du whisky s’est accrue l’an dernier de 135 000 hectolitres, atteignant un total de 940 000.

L’Angleterre, qui ne fabriquait pas de sucre, en consommait plus qu’aucune nation du continent et la moitié de celui qu’elle importait venait d’Allemagne et d’Autriche. Pourtant le sucre ne vaut aujourd’hui qu’un franc le kilo à Londres, tandis qu’il coûte 1 fr. 55 à Paris où l’on en manque. Or l’impôt dans les deux pays, depuis septembre 1915 où le droit de douane a été sextuplé dans le Royaume-Uni ne diffère que de 0 fr. 20. C’est sans doute que l’énormité de ses besoins comparée à l’exiguïté de ses ressources inspira dès le début au gouvernement anglais des résolutions plus audacieuses qu’au nôtre : en huit ou dix jours, au mois d’août 1914, il conclut par câbles sur divers points du globe des marchés pour plus de 800 000 tonnes, à des