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LES
RÉVOLUTIONS ÉCONOMIQUES
DE LA GUERRE

I
CHEZ LES BELLIGÉRANS

Le hasard d’un voyage me fit trouver, à Berlin, sur le passage de Guillaume II rentrant dans sa capitale le 31 août 1912, pour la célébration accoutumée de l’anniversaire de Sedan. L’automobile impérial, au drapeau flottant, faisait Unter den Linden le trajet de la porte de Brandebourg au palais au milieu d’un silence réprobateur. Pas un vivat ; à peine de-ci de-là quelques têtes se découvraient-elles avec une politesse distraite.

Quelques minutes plus tard, sur le même parcours, un grand bruit de hourras, d’acclamations frénétiques, annonçait de loin l’auto du kronprinz. Cet auto s’étant un moment arrêté pour déposer un de ses occupans, la foule ne cessa de se masser alentour en poussant des hochs enthousiastes. Le contraste était significatif entre les traitemens faits par les Berlinois au père et au fils. Ce fut, à peu de mois près, la date où l’Empereur disait à M. Jules Cambon le mot connu : « Eh bien ! mon cher ambassadeur, nous sommes maintenant dans l’ère des pommes cuites ; mais j’espère que nous serons bientôt dans celle des statues ! » À cette époque se discutait le traité du Maroc ; ce