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tâcher de déterminer les emplacemens de celles-ci et les détruire par le canon. Souvent cachées dans des caponnières, elles peuvent être prises à partie même par des pièces isolées.

En vue des rencontres qui allaient se produire sur la Meuse, des instructions spéciales visaient l’emploi de méthodes nouvelles pour l’artillerie : au cas où l’armée serait amenée à se replier sur la rive gauche de la Meuse, on recommandait, dès le 25, le plus large emploi de l’artillerie pour disputer à l’ennemi le passage de la rivière. On signalait l’importance nouvelle qu’allait prendre l’artillerie lourde : les canons de 120 long devront être employés à battre à grande distance les points où l’ennemi pourrait tenter de jeter des ponts. Les canons courts seront placés de façon à battre l’ennemi pendant le passage. Le canon de 75 sera plus particulièrement employé au flanquement du front et pour battre les abords immédiats de la rivière. Les emplacemens de batterie devront être reconnus avec le plus grand soin et des épaulemens solides construits partout où ce sera nécessaire.

L’ensemble de ces observations suffit pour établir de graves défectuosités dans la liaison des armes et notamment dans l’emploi de l’artillerie au début de la campagne ; mais elles montrent aussi la souplesse du génie français et sa faculté d’adaptation aux nécessités nouvelles. En moins de quatre jours, la vraie doctrine se dégage. Les Allemands ont, certes, une préparation plus complète, mais cette avance sera vite regagnée. Le général Bon, qui commandait l’artillerie d’un des corps, donnait à l’exposé de ces combats cette conclusion : « Sauf des engagemens d’avant-garde pénibles, les pertes avaient été légères ; l’artillerie était absolument intacte, les servans pleins de confiance en leur canon. Les officiers étaient confirmés dans leur méthode de tir et de combat. N’ayant eu presque ni tués ni blessés, tous se croyaient invulnérables. Les troupes d’infanterie avaient gardé le moral le plus solide. » Une constatation à peu près générale dans les deux armées, c’est que l’artillerie ennemie prodigue les munitions sans faire un mal proportionné : « Une chose nous fait plaisir, écrit un jeune officier d’artillerie, c’est la quantité énorme de projectiles dépensés par les Allemands et l’inefficacité relative de leur tir… Nous devons profiter des enseignemens de ce premier jour de bataille. »

L’armée française avait eu de ce chef, une double surprise,