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Les premiers zeppelins construits après 1898, qui avaient une douzaine de mille mètres cubes, paraissent bien petits à côté des géans que l’Allemagne a réalisés depuis la guerre et qui ont jusqu’à 54 000 mètres cubes. Comment sont agencés et utilisés ces mastodontes de l’espace aérien, ces tanks atmosphériques, héros depuis deux ans de tant d’aventures retentissantes, c’est ce que je voudrais indiquer maintenant d’après des renseignemens récens et sûrs. Dans ce qui va suivre je donnerai surtout des indications techniques et des chiffres un peu rébarbatifs a priori. Je m’en excuse auprès de ceux de mes lecteurs qui n’aimeraient point les choses sans ornement. Mais les chiffres ont leur éloquence, la plus nue, mais, partant, la plus concise et la plus nette des éloquences ; rien ne parle mieux à la raison qu’un chiffre, à la condition que cette raison soit étayée d’un peu d’imagination représentative. Et puis, comme l’a dit un grand ancien qui pourtant a laissé plus de trace dans la mystique que dans la connaissance positive du monde : AEI 0 ΘEOΣ ΓEΩMETPEI. Que je trouve en ceci mon humble excuse.

Les Allemands ont accoutumé de désigner leurs zeppelins par la lettre L (initiale du mot Luftschiff, qui veut dire aéronef) suivie d’un numéro d’ordre. Plus précisément ils désignent ainsi leurs zeppelins de la marine, et par les lettres LZ suivies d’un numéro d’ordre les zeppelins de l’armée de terre. Les derniers construits de ces appareils portent des numéros qui sont voisins de 95. Ils en ont fabriqué jusqu’ici environ une centaine, ce qui ne veut pas dire, loin de là, qu’ils en possèdent ce nombre… et pour cause.

La carcasse qui constitue le squelette, l’armature des superzeppelins, est en aluminium. Avant la guerre, les Allemands, comme nous-mêmes, tiraient surtout ce métal de notre bauxite ; de ce minerai dont les amoncellemens pittoresques ont donné au village des Baux sa poétique renommée. Privés de cette ressource, on dit que les Allemands ont réussi à extraire l’aluminium de l’argile vulgaire qui contient en effet ce métal à l’état de composé ; c’est fort possible.

La carcasse d’aluminium des L et des LZ a la forme d’un long cylindre ; avant la guerre, celui-ci était terminé aux deux bouts par deux ogives symétriques. Dans les modèles récens cette symétrie n’existe plus ; l’extrémité avant est arrondie ; l’extrémité arrière est au contraire effilée en pointe assez aiguë. Cette forme est en effet celle