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vie. Il jugea qu’Aubert ayant été nommé par le corps électoral, il y aurait, à protester, quelque péril. Donc il retint tout blâme sur ses lèvres. Il fit plus et, servile avec luxe, étala sa lâcheté : Le 9 mai, jour de l’Ascension, l’élu devait être proclamé en l’église métropolitaine. Gobel se rendit à Notre-Dame. Il s’y rendit processionnellement, accompagné de son clergé. En sa présence, le procès-verbal de l’élection fut lu. Puis Aubert monta en chaire pour y prononcer son discours d’installation et, dans sa harangue, osa glisser l’éloge de son mariage. Gobel écouta tout. Le nouveau curé, quand il eut fini, se dirigea vers le siège où l’évêque était assis. Celui-ci lui donna l’accolade, en signe de paix, d’acquiescement et d’adoption. Aubert prit place dans une stalle d’honneur. Presque en face de lui, un siège avait été, dit-on, réservé à sa femme, et l’un des vicaires épiscopaux nommé Denoux, la prenant par la main, l’y conduisit. La messe commença. Elle fut célébrée pontificalement, suivant le rite du jour qui était celui de Jésus monté aux cieux. Le prélat se retira ensuite, ayant bu jusqu’à la lie sa honte. En une lettre rendue publique, quatre curés de Paris protestèrent ; ils furent pour ce fait emprisonnés et ne furent libérés qu’au bout de deux mois. Quant à Gobel, son salaire fut un sursis pour sa charge et pour sa vie.

En ce conflit devenu fort aigu, que déciderait la Convention nationale ?

L’équité semblait lui imposer une conduite très simple. Dans les années précédentes, la loi de l’État pour la célébration des mariages n’avait été autre que la loi de l’Eglise elle-même : de là, pour les membres de l’Assemblée constituante et de l’Assemblée législative, l’embarras de séparer deux domaines jusque-là confondus. Mais le décret du 20 septembre 1792, en conférant aux magistrats communaux le soin de dresser les actes relatifs à l’état des personnes, avait permis de marquer avec sûreté ce que les pouvoirs publics devaient régir, ce qu’ils devaient ignorer. L’engagement dans les ordres n’étant plus, au point de vue civil, empêchement pour le mariage, les officiers municipaux pouvaient dresser acte du mariage des prêtres comme de tous les autres citoyens. Là s’arrêtaient les attributions de l’autorité séculière. Une fois mariés ou se croyant tels, les clercs ne relevaient, pour l’exercice futur de leurs fonctions sacrées, que de leurs supérieurs ecclésiastiques. C’était