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les réfractaires : une loi vient de prescrire leur déportation. Cependant ils s’inquiètent plus encore qu’ils ne se réjouissent : car les coups frappent pêle-mêle, et quelques-uns sur eux. Les prélats se sont complus dans les splendeurs de leur palais épiscopal : voici qu’un décret les leur retire et leur accorde en retour, comme aux plus chétifs des commis, une indemnité de logement. Vaniteusement ils ont revêtu leur soutane violette : voici que, le 18 août, l’Assemblée interdit tout costume, tout insigne ecclésiastique, hors de l’enceinte des temples. Ils ont trouvé très équitable la spoliation des abbayes, mais jugent très légitime le patrimoine des paroisses : or, voici que, le 19 août, une décision législative prescrit l’aliénation des biens des fabriques et la simple constitution d’une rente en échange de ces biens. L’Assemblée continue à légiférer. Avec un vandalisme inconscient et tranquille, elle ordonne que tout ce qui est or et argent dans les églises supprimées sera converti en lingots. C’est le mal d’autrui, et les assermentés se taisent. Quelques jours plus tard, l’ardeur de spolier s’étend aux églises conservées. On observe que, même dans les sanctuaires gardés aux fidèles, « les meubles et ustensiles d’or et d’argent sont de pure ostentation. » En conséquence, des commissaires s’introduiront dans les temples consacrés au culte officiel, comme naguère dans les couvens et les abbayes : ils ouvriront les sacristies, scruteront les armoires ; puis ils mettront à part les ostensoirs, les vases sacrés indispensables aux cérémonies liturgiques : le reste sera scellé, chargé sur des chariots et acheminé vers l’Hôtel des monnaies le plus voisin.

En une consternation atterrée, les assermentés mesurent leur chute. Les mêmes feuilles publiques qui, jadis, les ont encensés, commencent à les railler où à les flétrir. Dans les Révolutions de Paris, ils peuvent lire ces lignes : « Partout où se trament des complots contre la patrie ou contre la raison, soyez sûr qu’il y a des prêtres. » S’agit-il seulement des réfractaires ? En un des numéros suivans, le même journal écrit : « Quant aux prêtres constitutionnels, ils ne valent pas mieux que les autres. » Cependant, ceux qui sont déjà prêts pour le rôle de victimes sont encore, en apparence, fonctionnaires officiels. Les électeurs du second degré se réunissent pour choisir les députés à la Convention. En un grand nombre de