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brigade et à peu près au milieu de son front. À l’Ouest du canal, la situation demeurait « inchangée : » elle n’était pas des plus brillantes, cette région étant placée très obliquement par rapport au front de défense, ce qui constituait un gros inconvénient.

La nouvelle répartition des unités devait avoir lieu les 9 et 10 décembre. Bien qu’encore incomplète, la brigade disposait maintenant de cinq bataillons, groupés deux et demi sur le front, deux et demi au cantonnement ; l’amiral avait toujours son quartier général aux issues de Woesten. Mais le délabrement des tranchées, les pluies perpétuelles, le froid, commençaient à produire leurs effets sur les hommes, dont beaucoup étaient épuisés par leurs luttes antérieures. Les pieds gelés affluaient aux ambulances : ils étaient « typiques, énormes. » Le docteur Taburet, le 9 décembre, compte jusqu’à quarante malades dans une compagnie de 150 hommes. « Malades, dit-il, n’est pas le mot, mais endoloris. » Encore s’étonne-t-il qu’après trois jours d’immersion dans une eau glacée, « quelquefois jusqu’au ventre, » il n’y ait pas parmi eux plus d’affections de poitrine. L’état des boyaux est tel, le terrain si glissant, que les brancardiers ne peuvent accéder jusqu’aux tranchées. « Nous nous y transformerons certainement en grenouilles, écrit le quatrième jour l’enseigne Boissat-Mazerat, car nous y vivons dans l’eau à mi-mollet. Ayant fait quelques reconnaissances, je suis uniformément recouvert d’une couche de 2 centimètres de boue. Il pleut, les malades sont nombreux, la sélection se fait : je crois que nos compagnies fondront d’un bon tiers… » — « L’action est peu intense, écrit-il encore le 11, et nous n’avons chaque jour qu’un petit nombre de tués et de blessés. Malheureusement, il y a déjà beaucoup de malades. Les compagnies fondent, dissoutes par la bronchite et la dysenterie… » Les officiers ne sont pas plus épargnés que les hommes : le colonel Delage, le commandant Geynet, les capitaines Pinguet et de Malherbe, l’enseigne Poisson, même des médecins, le docteur Le Marc’hadour, le docteur Le Floch, sont atteints de gastro-entérite ; le capitaine Benoit a une mauvaise toux ; l’officier des équipages Bonhomet doit être évacué pour faiblesse générale[1].

  1. Mon petit Benoit tousse…, une toux mauvaise. Je lui ai mis de la ouate iodée. J’en ai un autre [officier] très chic, de Malherbe : je lui ai donné une boite de Bengué, quand nous sommes revenus du front pour le repos. Il n’avait plus de pantalon… » — « Hier, j’étais très dérangé : une catastrophe bête m’arrive la