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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Voici le fait brutal, et qui, depuis quelques jours, n’était que trop prévu. Bucarest, évacué par les troupes roumaines le 6 décembre au matin, a été presque aussitôt occupé par les Austro-Allemands, Comment l’opération a été menée ; avec quelle décision et quelle précision, avec quelle énergie, avec quelle rapidité ; comment l’anneau de fer, autour de la capitale, a été aux trois quarts fermé ; comment l’abandon de Bucarest a été rendu inévitable, pour en éviter la chute et la ruine ; comment, il nous faut bien le reconnaître, a supérieurement réussi un coup audacieux jusqu’à la témérité, sur lequel, si tout n’était pas gagné, tout était perdu pour les Allemands en Roumanie, c’est ce qu’on enseignera demain dans les écoles militaires, et ce qu’aujourd’hui nous laisserons à la discussion des spécialistes.

Pour nous, il nous suffira de regarder un simple croquis publié, dès le 28 novembre, par le Giornale d’Italia. La frontière roumaine, de la passe de Buzeu, vers la charnière des Alpes de Transylvanie et des Carpathes, jusqu’à Cernavoda sur le Danube, dessine une image très nette. C’est comme un sac, couché à terre, dont le fond est à l’Ouest, et l’ouverture au Nord-Est ou à l’Est. Les Allemands de Falkenhayn, entrés par les deux trous de la passe de Vulkan et d’Orsova, montent vers l’orifice, tandis que Krafft von Delmensingen et d’autres crèvent le bord septentrional de la poche vers la Tour-Rouge, vers Törzburg, vers Predeal, vers Bratocea, vers le col de Buzeu, et tandis qu’au Sud, sur le Danube, Mackensen fait une pesée de Tourtakaï à Cernavoda, avant de faire deux nouveaux trous à Zimnitza et à Islazu. Au 28 novembre, la situation est celle-ci, bien apparente sur le croquis du journal italien, qui la marque clairement par un tissu de hachures dont le nom seul est symbolique, reticolato. Une sorte de