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à notre gouvernement. Point n’a donc été besoin de recourir à l’établissement du cours forcé, bien que, dans les premiers jours d’août 1914, la Banque eût été dispensée de l’obligation de rembourser ses billets en or. Mais comme aucun billet n’avait été émis par elle pour le compte de l’État, sa circulation ne s’est à aucun moment élevée au-dessus du niveau normal, et elle a pu, au moyen d’une encaisse qui se maintient, continuer à rembourser ses billets en métal.

Billets d’État. — Mais si le gouvernement anglais n’a pas eu recours à la Banque, il a éprouvé le besoin, comme tous les belligérans, d’augmenter le volume de la circulation fiduciaire. Il l’a fait, contrairement à ce qui s’est passé chez nous, par la création de billets d’Etat d’une livre sterling et d’une demi-livre (environ 28 et 14 francs au change actuel), désignés sous le nom de currency notes. Le but premier de cette émission, décidée le 6 août 1914, fut de venir en aide aux Banques, auxquelles le chancelier de l’Echiquier avait refusé d’accorder un moratorium. Afin de leur permettre de faire face à toutes les demandes de remboursement qui leur seraient adressées par leur clientèle, il offrit d’avancer, à celles qui en feraient la demande, une somme égale au cinquième des engagemens de chaque établissement, représentés par ses dépôts et ses comptes courans. Les sommes avancées portent intérêt en faveur du Trésor au taux d’escompte qui est en vigueur à la Banque d’Angleterre.

Telle fut la genèse de ces billets d’État, qui ne tardèrent pas à servir à d’autres besoins que celui en vue duquel ils avaient été créés. Les banques remboursèrent les avances qui leur avaient été faites, et cependant les billets d’Etat, non seulement restèrent en circulation, mais augmentèrent graduellement. Ils sont gagés par une encaisse d’or que le gouvernement a spécialement affectée à leur garantie ; la différence entre cette encaisse et le total de la circulation représente la somme fournie de cette manière au gouvernement par le public. C’est un emprunt d’une nature particulière, dont le caractère n’apparaît pas aussi nettement que celui d’un titre de rente, et qui entraîne les inconvéniens résultant de cette ambiguïté. Des émissions de ce genre ne peuvent être indéfiniment multipliées. Ce qui met d’ailleurs celle du gouvernement anglais au-dessus de toute critique, c’est que les currency notes sont