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FRANCE ET ANGLETERRE
L’AVENIR
DE LEURS RELATIONS INTELLECTUELLES

Pendant les premiers mois de l’effroyable lutte qui est en train de déchirer l’Europe, l’attention des Alliés s’est, naturellement, concentrée tout entière sur les nécessités de la défense matérielle ; mais à mesure que nous avons vu s’équilibrer les forces entre le lâche envahisseur et ceux dont il s’était fermement attendu à faire ses victimes, nous avons compris de plus en plus clairement l’obligation, pour nous, d’envisager aussi les très graves aspects spirituels du conflit. L’un de ces aspects, tout au moins, nous apparaît dès maintenant avec une évidence absolue : nous constatons que nous allons être tenus, à l’avenir, de défendre contre l’intrusion germanique nos facultés intellectuelles non moins vigoureusement que nos rivages, et notre commerce et notre industrie. Après quoi l’on entend bien que l’heure est passée des reproches mutuels. Il nous serait dorénavant tout à fait inutile de réveiller les échos en nous criant aigrement, l’un à l’autre : « Je vous l’avais bien dit ! » ou encore : « Comment se peut-il que vous n’ayez pas prévu ? » Admettons plutôt, avec une humilité allégée de tous remords superflus, que, ni en Angleterre, ni en France, nous n’avons assez nettement discerné les défauts et le danger de la « culture » allemande ; mais, cela admis, il n’en reste pas moins qu’un examen de ce que pourront être à l’avenir les relations intellectuelles de la France et de l’Angleterre ne saurait se dispenser de