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LES MARAIS DE SAINT-GOND.


la 42e division et la division marocaine occupent les croupes de Saint-Prix, Soisy, le bois de Saint-Gond, la falaise de Mondement et le plateau de Villeneuve-lès-Charleville ; le 9e corps tient toute la lisière méridionale des marais, d’Oyes à Morains-le-Petit inclus, avec des avant-gardes à Vert-la-Gravelle, Aunilzeux, la Chapelle et au centre des marais, notamment devant l’ancien prieuré de Saint-Gond ; le 11e corps prend la liaison à Morains-le-Petit, pointe orientale des marais, et s’étend par Ecury-le-Repos, Normée et Lenharrée, jusqu’à Sommesous, avec avant-gardes sur Coligny et Pierre-Morains ; la 9e division de cavalerie est à Mailly, avec avant-garde vers Vatry ; les divisions de réserve du 11e corps (52e et 60e divisions) sont entre Sommesous et l’Aube.

Le simple examen de ces positions indique bien que la 9e armée, numériquement inférieure aux armées adverses, doit provisoirement se borner à un rôle de défensive active, suivant l’expression militaire. Plus qu’aucune autre, elle « fait barrage, » et elle fait barrage au centre, c’est-à-dire au point le plus sensible de notre ligne : Foch enfoncé, tout notre dispositif craque, et c’est particulièrement l’échec de l’offensive commandée sur notre gauche à la 5e armée, qui opère dans la direction générale de Montmirail, avec Franchet d’Espérey, et, sur notre droite, à la 4e armée (de Langle de Gary), qui, victorieuse sur la Meuse le 27 août, brûle de reprendre sa marche en avant et opère dans la direction de Vitry-le-François. Mais, entre Humboville, où s’appuie la gauche de cette 4e armée, et Sommesous, où s’appuie la droite de l’armée Foch, il y a un grand vide, un « hiatus, » que bouche mal la 9e division de cavalerie. Par grand’chance, à cet hiatus en correspond un autre de l’armée allemande, qui s’apercevra trop tard que nous n’avions là qu’un rideau d’escadrons.

Maître par Esternay et Charleville de l’extrémité occidentale du plateau de Sézanne, von Bülow devait inévitablement chercher à occuper la totalité de ce plateau, dont l’ourlet abrupt commande toute la vallée de l’Aube, une immense étendue de pays jusqu’à Troyes, qui, par temps clair, profile ses tours à l’horizon. La pression va donc s’exercer sur nous en flanc vers Villeneuve-lès-Charleville et Soisy, où la célèbre 42e division de Verdun et une fraction de l’armée de Franchet d’Espérey n’auront pas trop de leurs efforts réunis pour contenir le choc.