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coule vers le Nord-Est, fait un angle droit au Sud-Est. Entre ce coude et Kut-el-Amara, sur un parcours de douze lieues environ, l’armée ottomane possédait quatre lignes de défense successives. Sur chaque rive, un marais, dont à gauche celui de Suwekie, donnait à leurs deux ailes des points d’appui impossibles à tourner. Les trois positions d’Ounm-el-Henna reposaient sur cette configuration du pays. Le quatrième retranchement, à Es-Sinn, était le plus considérable. Au Nord du Tigre, il protégeait les deux flancs du marais de Suwada ; au Sud, il s’étendait jusqu’au Chatt-el-Hai, en s’appuyant sur six redoutes et l’ouvrage Dujailar. Ce dernier était la clef de tout le système, et sa prise devait délivrer Kut-el-Amara, en rendant inutiles toutes les autres fortifications ennemies.

Le général Aylmer commit l’erreur d’attaquer de front. Après une préparation d’artillerie insuffisante, le 21 février, l’offensive commence. Les troupes anglo-indiennes, enfonçant dans la boue jusqu’aux chevilles, ne purent même pas aborder les tranchées. Sous le feu des canons qui leur tuèrent beaucoup de monde, nos Alliés s’installent à 1 300 mètres de l’adversaire. Les jours suivans se passent a bombarder les positions ottomanes et en reconnaissances aériennes.

Sur ces entrefaites, sir John Nixon, commandant en chef du corps expéditionnaire de Mésopotamie, est remplacé pour raison de santé par le général sir Percy Lake, chef d’état-major de l’Inde.

Enfin, le 6 mars, on adopte le seul parti possible. Trois colonnes anglaises quittent Orah dans la nuit, évitent les lignes ottomanes et longent le rebord Sud du marais, au Nord duquel se trouve l’adversaire. A cinq heures du matin, une marche forcée dans le désert les amène devant la redoute Dujailar. Déjà, ils voient au loin tirer les pièces de Kut-el-Amaral Les Turcs, surpris, sont en petit nombre... et, pourtant, l’attaque échoue ! Pourquoi ? La raison en est encore inconnue, mais quoi qu’il en soit, la garnison de Kut ainsi qu’on va le voir était dès lors, condamnée.


A la suite de ces malheureuses circonstances, la colonne Aylmer change de chef. Le général Gorringe, le vainqueur d’Ahwaz et de Nasirieh, est appelé à tenter un dernier effort pour