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conservation des objets dont la garde ne pourrait être assurée sur place, mais aussi pour offrir à ceux qui veulent s’instruire des séries de pièces bien choisies et bien classées. Maspero avait activement travaillé, pendant sa première direction, au développement du musée de Boulaq, créé par Mariette. Il eut tout le mérite de l’aménagement excellent du musée du Caire. Dès 1900, on avait commencé à en imprimer, sous sa direction, le Catalogue général. Continué depuis lors par ses soins, ce catalogue est devenu un répertoire de premier ordre, dont les planches reproduisent tous les objets qui offrent un intérêt à l’artiste ou à l’historien. Une même pensée l’inspirait dans la création des musées provinciaux dont il avait conçu le projet et qu’il a commencé à organiser. Destinés à recueillir surtout des objets déjà représentés dans les séries du Caire, ces musées devront faciliter aux visiteurs des localités célèbres l’intelligence des monumens de la région et de leur histoire.

Dans cette brillante carrière de chef de service et d’administrateur, Maspero a eu certainement de grandes satisfactions. Il a pu faire beaucoup pour la science à laquelle il s’était voué. Il a eu le plaisir de le constater par lui-même, de sentir son œuvre s’élargir et progresser d’année en année, et aussi celui de la voir comprise, admirée même, presque unanimement. Les honneurs qui lui ont été conférés ont dû prendre pour lui une valeur particulière parce qu’ils étaient vraiment les témoignages de services éclatans. Il était devenu membre de l’Académie des Inscriptions dès 1883, à l’âge de trente-sept ans. D’autre part, le gouvernement égyptien et le gouvernement anglais lui donnèrent, l’un et l’autre, les plus hautes marques de leur estime et de leur gratitude, Mais il eut aussi à subir, en raison de ses fonctions et de la conscience qu’il mettait à les bien remplir, des épreuves pénibles, au moins dans ses dernières années. Elles lui furent d’autant plus sensibles qu’il devait moins s’y attendre et qu’il s’efforçait d’ailleurs, par une discrétion qui avait sa fierté, de les dissimuler le plus possible. Cette amertume secrète, s’ajoutant aux fatigues physiques qu’il n’avait jamais voulu s’épargner, contribua sans doute à l’altération de sa santé, avant qu’il se décidât à quitter définitivement l’Egypte. Elle fut, à n’en pas douter, une des causes de sa fin prématurée.