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« dans les atrocités allemandes de Belgique, il s’agit d’abus et d’excès non individuels, mais d’un système général raisonné et continu. » Puis il examine les tentatives individuelles souvent contradictoires, faites en Allemagne pour rejeter sur le peuple belge la responsabilité des atrocités allemandes :


On ne saurait assez le redire : nonobstant les mises en demeure qui lui sont adressées, l’Allemagne ne saurait prouver, nous ne disons pas seulement une organisation, mais un certain nombre de cas, même isolés de francs-tireurs.

À ce jour, nous ne connaissons, pour les provinces de Namur et de Luxembourg, que trois noms de francs-tireurs qui auraient été cités par l’autorité allemande. Ce sont trois ecclésiastiques, M. l’abbé Laisse, curé de Spontin, M. l’abbé Bilande, aumônier des sourds-muets à Bouge et M. l’abbé Pierret, vicaire d’Étalle.


L’évêque a fait la lumière sur ces trois cas.

Dès le 10 avril 1915, il a protesté, documens en mains, de l’innocence du curé de Spontin. « Nous sommes de plus en plus, dit-il, à même de la prouver. »

Quant aux deux autres cas, il demanda à l’autorité militaire allemande de Namur de lui communiquer les « preuves » de culpabilité : elle lui répondit que l’un des cas (Etalle) n’était pas de son ressort, et que, pour le second (Bouge), « Sa Grandeur était libre de s’adresser à la rédaction des Pax-Informatione » qui avait reçu et publié le communiqué. Celui-ci, pourtant, avait été présenté comme émanant du ministère de la Guerre de Prusse ; l’évêque insista donc (26 avril 1915) : « Cette lettre, dit-il, est restée sans réponse. » Et il ajoute :


L’Allemagne continuera à publier les noms des trois francs-tireurs namurois, mais le monde n’y croira pas.

À notre avis, en cette question si grave, la situation de l’Allemagne nous paraît exactement figurée par l’inextricable embarras d’un imprudent qui s’embourbe dans un marais et qui, à chaque effort tenté pour en sortir, s’enfonce davantage. L’orgueil national de ce pays l’a empêché, au cours de l’invasion, de soumettre à une enquête la parole de ses soldats ; il l’empêche encore maintenant de répondre à la mise en demeure qui lui est adressée de faire contradictoirement la preuve que des civils ont tiré.

Pareil refus est un aveu de son impuissance à faire éclater la vérité.


Mgr Heylen en vient alors à discuter la tentative officielle de justification des armées allemandes, faite dans le Livre Blanc.