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marais que l’Italie recherche, dans son industrie chapelière, pour mélanger au feutre la soie légère de sa massette.

Le Maroc, surtout, s’est distingué. On sait que, depuis le début de la guerre, M. le général Lyautey, hardi et prudent tout ensemble, a choisi, pour la défense du protectorat, la politique habile qui consiste à en faire un chantier actif et fécond. Non seulement il n’a pas ramené nos troupes et nos colons sur la côte, comme on le lui a peut-être demandé, mais il a consolidé notre occupation, affermi et étendu le prestige de la France. L’Exposition franco-marocaine de Casablanca fut l’acte essentiel de cette politique, acte plein de sens, malgré ses apparences paradoxales. La France, qui n’est venue officiellement au Maroc qu’en 1907, et qui, depuis cette date, y avait travaillé on collaboration avec trois ou quatre autres peuples, dont l’Allemagne, s’affranchissait d’un seul coup. Les produits austro-allemands, comme nous l’a raconté M. Jean Wilms, rédacteur de la Vigie Marocaine, étaient, sans répit, contre-attaques. Les marchands musulmans s’habituaient à fréquenter nos bureaux de renseignemens économiques. Les commerçans français envoyaient de si nombreux échantillons qu’il fallait les rassembler : d’où l’Exposition. M. Terrier, directeur de l’Office du gouvernement chérifien ; M. Victor Berti, sous-directeur du contrôle de la Dette, multipliaient les efforts ; des missionnaires, MM. Luret et Toulzat, parcouraient la France, à la recherche de concours. La manifestation de Casablanca a été l’une des plus évidentes démonstrations de la vigueur de notre génie national, lorsqu’il se sent menacé. Elle a fait apparaître du même coup l’importance économique d’une contrée qui importe déjà pour 231 millions de francs, qui a besoin d’un outillage considérable et qui exporte, en produits d’agriculture et d’élevage, pour 46 millions (orge, blé, maïs, amandes, graines de lin, bœufs, peaux, laines, œufs, etc.). L’Allemagne était le troisième fournisseur et le troisième client du Maroc, après la France et l’Angleterre.

À Lyon, l’acheteur marocain et le vendeur français se sont rencontrés. Une importante délégation de commerçans indigènes a parcouru les stands avec avidité : l’industriel français a pu étudier les produits allemands, échantillonnés sur des cartes où se lisait la marque de la Compagnie Mannesmann. Nous pensons avoir servi, de cette façon, la politique de M. le