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BERNARDINE.

Ce n’est pas ce qu’elle m’a dit. J’ai cru comprendre que vous aviez accepté déjà et que sa démarche auprès de moi était une simple formalité de politesse.

VAUCROIX.

Alors, qu’est-ce que vous comptez faire ?

BERNARDINE.

Lui écrire, dès cet après-midi, que j’ai réfléchi et que les études des garçons ne me permettent, ni de les emmener, ni de m’absenter.

VAUCROIX.

Alors moi, j’irai seul ?

BERNARDINE.

Naturellement. Vous me donneriez raison aussitôt, si vous aviez un peu l’expérience de l’éducation des enfans. J’ai beaucoup réfléchi depuis ces quatorze mois que je n’ai vécu littéraralement qu’avec eux. Pour bien les élever, la première condition, c’est l’absolue régularité, la totale absence de caprice, une monotonie de couvent dans les habitudes. J’ai des principes de gouvernante anglaise là-dessus. Tenez. Rien que leur excitation de ce matin à la perspective d’un voyage fera qu’ils ne travailleront pas bien de la journée. Que serait-ce à la villa d’Hespelles ? Sans compter que je ne pourrais pas emmener leur professeur, n’est-ce pas ?

VAUCROIX.

Vous avez votre mère à qui les laisser.

BERNARDINE.

Pour qu’elle les pourrisse de gâteries ?... Et puis, ils me manqueraient trop. Je vous le répète, depuis ces quatorze mois, je n’ai vécu qu’avec eux. Ne me demandez pas de m’en séparer. Ça me coûterait trop.

VAUCROIX.

C’est bien. J’irai seul. Du moment que vous vous chargez de vous en expliquer avec Julie... Elle insistera, vous savez.