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plus aisé que d’en introduire de nouvelles ? On nous a objecté que plusieurs de nos départemens sont encore occupés et qu’on ne saurait, sans injustice, frapper les autres, alors que certaines régions du Nord et de l’Est ne peuvent fournir leur quote-part. Mais il nous semble que toutes les parties du territoire qui sont restées inviolées doivent d’autant plus allègrement consentir des sacrifices qu’elles ont échappé au désastre de l’invasion. D’ailleurs cet argument, s’il était topique, s’opposerait encore bien mieux à l’application d’un impôt nouveau. En résumé, nous disons au gouvernement : Nous allons acquitter l’impôt complémentaire sur le revenu ; mais il ne vous donnera que peu de chose. Présentez-nous donc d’autres projets. Personne ne s’imagine qu’une tourmente comme celle que nous traversons n’aura pas une influence profonde sur l’économie nationale, sur les finances de l’Etat et celles des citoyens. Plus vite on prendra les résolutions nécessaires, et mieux cela vaudra. On a prétendu quelquefois que les Français donnaient leur vie plus aisément que leur bourse : si cela est vrai de quelques-uns d’entre eux, l’immense masse de la nation met les sacrifices à leur place, et sait que celui d’une partie de nos biens n’est rien à côté de celui de nos enfans. Nous empruntons, avec raison et avec succès : mais il convient, en face des arrérages à payer et du capital à amortir, d’inscrire dans notre budget des ressources nouvelles. C’est à quoi nos législateurs devraient s’appliquer sans retard.

Ici même, à plusieurs reprises, nous avons tracé le programme de ce qu’il conviendrait de faire. Un double décime devrait être ajouté aux impôts existans et procurerait immédiatement des sommes appréciables. Il faudrait rétablir certains droits sur les boissons, tels que ceux de circulation et de congé, qui avaient été supprimés et qui représentent une charge bien légère en comparaison de celle que fait peser sur le consommateur la hausse violente des vins, qui ont doublé de prix depuis l’an dernier. Un projet de loi sur l’alcool, susceptible de fournir un appoint sérieux au budget de l’Etat et à celui des communes, a été déposé par M. Ribot au mois de septembre 1915. Qu’attend le Gouvernement pour le faire mettre à l’ordre du jour des Chambres ? Il est d’autant plus nécessaire de hâter le vote de cette loi qu’elle est destinée à apporter un premier remède, encore bien insuffisant, hélas ! à l’effroyable fléau de l’alcoolisme