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cette nouvelle arme fiscale, des ressources appréciables, seront très déçues lorsqu’elles verront quelle maigre somme elle produit et de quel médiocre secours elle est au budget. Elles seront alors tentées, suivant l’expression aujourd’hui consacrée, de donner un tour de vis, c’est-à-dire d’augmenter le taux de l’impôt qui, par suite de son caractère surérogatoire, deviendra aussitôt excessif parce qu’il s’ajoute aux autres : il dépassera la quotité de l’Income tax anglais, qu’on nous cite volontiers en exemple, mais en oubliant d’ajouter qu’il ne se superpose jamais.

Que nos lecteurs ne voient pas dans ce qui précède une vaine récrimination ni une critique chagrine, par le seul motif qu’une charge nouvelle est ajoutée à celles que nous supportons déjà. Nous savons, mieux que personne, qu’une guerre comme celle que nous menons implique des dépenses formidables et qu’elle aura pour conséquence le doublement de nos impôts. Les Français sont prêts à tous les sacrifices et à tous les efforts pour se débarrasser à jamais d’un ennemi qui voulait nous asservir, nous enlever le bien suprême, celui sans lequel tous les autres ne sont rien, l’indépendance. Nous ne marchanderons pas plus notre or que notre sang, mais à deux conditions : la première, c !est que les dépenses soient ordonnées et contrôlées avec la sévérité qu’exige le respect des forces contributives de la nation ; la seconde, c’est que les impôts soient assis avec logique, franchise et clarté. La loi du 13 juillet 1914 ne répond malheureusement pas à ce desideratum.

Elle est néanmoins entrée en vigueur, et nous n’avons, en bons citoyens, qu’à choisir entre les deux modes prévus par elle, déclaration ou taxation administrative. Nous nous sommes efforcé de la faire connaître dans son ensemble et dans ses détails, et d’écarter les doutes qui peuvent subsister sur plusieurs points, même après l’étude la plus approfondie. L’époque de guerre n’est pas favorable pour tenter une expérience aussi pleine d’inconnues. Nous eussions compris que l’on commençât par majorer un certain nombre des impôts existans, comme l’ont fait plusieurs belligérans. Sans parler de l’Angleterre, qui est le pays des résolutions fiscales vigoureuses, n’avons-nous pas vu la Russie et même l’Italie, dont les dépenses sont cependant faibles en comparaison des nôtres, augmenter le taux d’un grand nombre de taxes déjà établies, ce qui est en général