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connus, des données que l’administration possède sans avoir à demander aucun renseignement vexatoire ni à poursuivre d’enquête minutieuse, tels que le produit d’un immeuble, le loyer de l’appartement occupé, le nombre d’ouvertures de la maison, l’importance des locaux affectés à une industrie ou à un négoce, le nombre des employés d’une entreprise commerciale. A l’époque où cette législation a été mise en vigueur, elle ne laissait échapper aucune portion appréciable du revenu, à l’exception des rentes sur l’Etat qui, de propos délibéré, avaient été affranchies de l’impôt. Cette exemption se comprenait d’autant mieux que, par la consolidation, on venait de frustrer les rentiers des deux tiers de ce qui leur était dû. La fortune des Français consistait en immeubles, ou s’alimentait par les profits du négoce, de l’industrie, de certaines professions libérales, assujetties à la patente comme les entreprises commerciales. L’impôt foncier était proportionné aux sommes dérivées de cette source ; l’impôt mobilier variait en raison de la valeur locative des locaux occupés, estimée devoir être d’autant plus élevée que la fortune de l’habitant est plus grande,

A côté de ces quatre contributions était instituée une série d’impôts sur le capital qui, sous le nom de droits d’enregistrement, atteignent la propriété chaque fois qu’elle change de main : les droits de mutation frappent les immeubles ou les meubles au moment où ils passent dans un nouveau patrimoine par suite de donation, de vente ou de décès. Les droits de timbre, applicables aux effets de commerce, procèdent de la même idée et correspondent au prélèvement d’une fraction de la valeur des marchandises dont l’échange donne lieu à la création d’une traite. L’importance de ces diverses amputations est considérable : les acheteurs d’immeubles acquittent environ 8 pour 100 du prix entre les mains du percepteur, sans compter les honoraires du notaire. Pour peu qu’une maison ait changé de propriétaire une demi-douzaine de fois en un demi-siècle, ce qui arrive fréquemment, la moitié de sa valeur a été versée à l’État.

Lorsque le développement rapide des valeurs mobilières eut mis en circulation un très grand nombre de ces titres, le législateur se préoccupa de soumettre cette partie de la fortune à des impôts équivalens à ceux qui en frappaient les autres élémens. Ici, la constatation du revenu étant particulièrement facile, rien ne s’opposait a l’établissement d’une taxe le frappant