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complications eurent un effet funeste sur la grande guerre d’Europe. Plusieurs versions ont circulé à ce sujet. Voici, en tout cas, ce qu’en dit un journal du Nippon, le Japan Chronicle du 6 juillet dernier :

« L’arrêt soudain de la marche victorieuse vers l’Ouest, en apparence écrasante, des armées russes, en Prusse et à travers les Carpathes en Hongrie, ainsi que les durs revers que ces années ont subis depuis leur recul à Przemysl, sont attribués par quelques observateurs de Washington à la récente crise dans les relations entre la Chine et le Japon.

« Selon des rapports reçus dans les cercles diplomatiques de Washington, la Russie, au commencement de la guerre, s’adressa au Japon pour la fourniture de matériel de guerre. Le Japon se trouvait en position de vendre toute quantité de munitions, de petites armes et même de canons, après le siège de Kiaotcheou, alors qu’il n’avait plus besoin de conserver une grande armée mobilisée ; aussi toutes les réserves des munitions japonaises dont on put disposer furent-elles chargées sur des wagons de marchandises, sur des express, et même dans des voitures à voyageurs, et envoyées par le Transsibérien en Russie. En outre, les manufactures d’armes japonaises et les usines métallurgiques reçurent et commencèrent à exécuter rapidement d’importans contrats pour la fourniture à la Russie de toutes sortes d’équipemens militaires, depuis des canons de campagne jusqu’à des uniformes et des selles.

« Lorsque les négociations entre la Chine et le Japon au sujet de la Mandchourie, de la Mongolie et de Kiaotcheou arrivèrent soudain à la phase critique, on dit que le gouvernement japonais estima prudent de garder au Japon ces fournitures militaires par mesure de précaution, dans le cas où les Chinois feraient la guerre, et aussi eu raison de la possibilité de ce que quelqu’une des puissantes nations qui ont garanti l’intégrité de la Chine, même en tenant compte de la Russie, pût faire effort pour intervenir. L’effet de la conservation des ressources japonaises se manifesta presque instantanément au loin sur le front russe, car elle montra que les Russes avaient épuisé tout leur stock de munitions, et qu’avec leur production limitée, ils dépendaient du Japon pour la plus grande partie de la poudre, des cartouches, des obus dont l’armée avait besoin. En cette occurrence, des appels furent adressés au Japon, afin qu’il relâchât