Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 30.djvu/831

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jour, depuis l’entrée dans son sein de la Russie et du Japon, la résistance des financiers inquiets avait obligé le nouveau sextuple groupe à renoncer aux projets grandioses du début. Il ne s’agissait plus d’exposer des milliards en vue de mettre la Chine en valeur. Les ambitions étaient devenues plus modestes, elles se bornaient à empêcher le pays de sombrer dans la faillite en lui permettant de franchir sans encombre la passe difficile des échéances.

D’autre part, afin que le crédit de la Chine ne périclitât pas sur les Bourses d’Occident, il était indispensable qu’un semblant d’ordre fût maintenu, que les porteurs de fonds chinois ne fussent pas troublés dans leur quiétude par la nouvelle de mouvemens révolutionnaires, de troubles, de séditions de manifestations anarchiques. Or, l’attitude autoritaire du président permettait de tout craindre à cet égard, des meurtres juridiques avaient été commis sur la personne de certains républicains ses adversaires ; on sentait chez ceux-ci un frémissement précurseur d’un orage, d’un nouveau soulèvement.

Le rusé Yuen, pour décider le consortium à lui fournir le moyen de vivre et de payer les soldats mercenaires avec lesquels il préparait un coup d’État, agitait devant les diplomates la menace d’une anarchie qu’il ne pourrait réprimer sans argent. Il réussit ainsi à contracter en 1913 un emprunt de six cent trente millions de francs, sur lequel on lui en remit environ le tiers, de semaine en semaine.

Quand il devint évident que la politique du président allait aboutir en réalité à la destruction de la République par un coup d’État, M. Wilson ne voulut pas que les États-Unis s’associassent à une telle entreprise et il ordonna aux banquiers américains de se retirer du groupe. Le consortium ne comprit donc plus que cinq Puissances : Allemagne, Angleterre, France, Japon, Russie.

La Russie entraînant avec elle les trois Puissances occidentales marchait à fond pour la dictature et le disait bien haut dans les journaux à sa solde ; le Japon observait une autre attitude. Il ne pouvait oublier que Yuen avait été autrefois son adversaire, que le vice-roi avait jadis habilement contrecarré ses entreprises en Corée, et, tandis que les représentans officiels du Mikado discutaient à Pékin les opérations financières qui devaient aboutir à la destruction de la République, quantité de Japonais