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Société générale des prisons, il soutint à l’endroit de la Préfecture de Police et du régime des mœurs. Assez défiant envers ceux qui, sous prétexte de liberté, soutenaient bien bruyamment des opinions bien théoriques et d’une valeur bien douteuse, il avait pris le parti le plus conforme à toutes ses traditions, à tout son passé. Je connais, disait-il au personnel de la Préfecture, nos excellentes intentions et notre prudence, et je ne doute, pas qu’elles soient souvent méconnues par le public ou par les hommes de parti. Pour qu’elles ne le soient pas, pour qu’elles ne puissent pas l’être, il faut que ce soit plus souvent la loi même qui intervienne, et que les mesures que vous prenez, — si semblables à de vraies pénalités, — ne soient pas dues à un pouvoir administratif ; car toute mesure purement administrative peut être qualifiée d’arbitraire. Si, dans certains cas, il est impossible d’échapper à la nécessité d’une décision prompte, simple, pratique, sans appareil judiciaire, il importe que la limite soit elle-même déterminée par la loi. Présentement, elle ne l’est pas assez. » N’est-ce point là une argumentation qui achève heureusement de caractériser la physionomie et l’attitude de l’éminent criminaliste ?

Il eût voulu faire plus encore : il eût très ardemment souhaité, — alors que l’âge ne lui laissait plus tant d’ardeur pour la lutte, — que bien des œuvres de charité, d’un esprit tout à fait chrétien, ne fussent plus l’objet de campagnes de calomnies, comme celles qu’on a dû, je pense, oublier. Mais entre ceux qui font le bien il ne saurait être question de concurrence. M. Bérenger ne s’intéressa pas seulement à quelques œuvres laïques de rédemption où l’on a essayé de méthodes plus ouvertes, plus accessibles, plus ménagères de la faiblesse juvénile ; il provoqua lui-même la création d’un asile spécial. Grâce à des concours de personnes respectables et très généreuses, on eut là un échantillon à joindre au petit nombre de ceux qui sont bien dignes d’attirer la charité vivant au milieu du monde : ici une œuvre soignant maternellement une demi-douzaine de repenties, là une maison réussissant à en conserver vingt ou vingt-cinq. Répétons-le, ce sont là des échantillons précieux, à donner à étudier aux dilettanti, aux amis ou amateurs de l’apostolat des égarés. Ils y apprendront beaucoup de choses ; ils y verront combien est lourde la tâche de recruter, de former, de défendre un personnel auquel incombe le soin de moraliser les êtres