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En dépit de ces précédons, M. Ribot s’est arrêté à une rente perpétuelle, c’est-à-dire à celle dont le capital n’est jamais exigible par le créancier, tandis que le débiteur a toujours, sauf stipulation contraire, le droit de le rembourser. Dans l’espèce, afin de garantir aux souscripteurs la jouissance de l’intérêt attaché au titre pendant une longue période, le gouvernement français a renoncé à ce droit de remboursement jusqu’au 1er janvier 1931. Nous approuvons pleinement le choix d’un type de rente perpétuelle, car, en présence des incertitudes de l’avenir, il peut être téméraire de s’engager à restituer aux souscripteurs leur capital à une date fixe. D’autre part, si les conditions d’émission de l’emprunt eussent comporté un amortissement annuel par tirage au sort, il n’eût pas été possible de procéder à des conversions qui seront sans doute possibles après 1930 et qui procureront alors un allégement sensible de la charge annuelle du Trésor.

La détermination du taux d’intérêt à offrir aux souscripteurs était relativement aisée. Depuis le début de la guerre, le taux d’escompte de la Banque de France n’est pas descendu au-dessous de 5 pour 100 ; c’est celui qui a été attaché aux Bons de la Défense nationale d’une échéance de 6 mois à 1 an, aux obligations de la Défense nationale. Ce fut jadis celui des emprunts de la libération du territoire, émis en 1871 et en 1872 et souscrits alors avec un enthousiasme qui marqua, pour notre pays, la première joie du relèvement après les douleurs de l’invasion et de la défaite. « Le 5 pour 100, » dirons-nous avec le ministre des Finances, qui en a éloquemment évoqué l’histoire, « c’est le vieux fonds français qu’on trouvait partout, dans toutes les maisons, j’allais dire dans toutes les chaumières, que nos pères ont connu, qu’ils ont aimé, parce que c’était quelque chose de la France, un souvenir des jours qui ont suivi les longues guerres qu’elle avait soutenues. Le nouveau 5 pour 100 sera bientôt aussi populaire qu’a été celui de la Restauration ; nous le retrouverons dans les tiroirs les plus modestes, aussi bien que dans les coffres-forts des grosses fortunes. » L’exemple de celui de nos Alliés dont la puissance financière est la plus grande ajouterait, s’il était nécessaire, un argument de plus à tous ceux qui militaient en faveur de l’adoption du type 5 pour 100. L’Angleterre, qui a commencé par un 3 1/2 en novembre 1914, a émis un 4 1/2 au mois de