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La procédure en usage peut se résumer comme suit. Pour chaque prise, après les opérations effectuées en mer, intervient une première instruction faite au port où le bâtiment capturé a été conduit. Les pièces en sont transmises au ministre de la Marine, qui peut ordonner la relaxe. Dans le cas contraire, il envoie le dossier au Conseil des prises. À partir de son arrivée au secrétariat, ce dossier y reste un mois à la disposition des avocats des capturés. Il est ensuite envoyé à un rapporteur pris parmi les membres du Conseil, au commissaire du gouvernement et au président. À l’expiration d’un second mois, au plus tard, la décision doit intervenir. À la séance où l’affaire est appelée, le commissaire du gouvernement fait connaître les conclusions du ministre dont le Conseil est saisi, ainsi que les siennes ; le rapporteur expose l’affaire ; puis chacun d’eux reprend la parole, le commissaire pour formuler, s’il le veut, des observations personnelles, et le rapporteur pour lire le projet de décision qu’il a préparé. Suit une délibération qui ne laisse pas d’ordinaire d’être animée. La décision n’est pas l’objet d’une lecture publique, mais elle est transmise au ministre de la Marine, qui en assure ensuite l’insertion au Journal Officiel.

Cette procédure donne de sérieuses garanties aux intéressés. Les propriétaires des bâtimens ou des marchandises capturés sont informés de l’arrivée du dossier au secrétariat du Conseil des prises, d’abord par un avis général inséré au Journal Officiel, puis par des lettres individuelles, lorsqu’il s’agit de neutres et que leurs adresses sont connues. Ils n’ont pas, il est vrai, la faculté de venir s’expliquer eux-mêmes devant le Conseil, ni même de lui envoyer personnellement des notes écrites. Mais ils peuvent s’y faire représenter par des avocats au Conseil d’État, qui y déposeront des mémoires en leur nom. En outre, si ces propriétaires sont des neutres (ou a fortiori des alliés), leurs consuls peuvent adresser au Conseil des justifications en leur faveur. Enfin, une voie de recours leur est ouverte contre les décisions du Conseil. Cette faculté est réciproque, car elle appartient aussi au ministre de la Marine. Les conditions dans lesquelles elle s’exerce méritent d’être ici précisées.

L’appel des décisions du Conseil des prises est porté devant le Conseil d’État. Mais ce n’est pas, comme on le croit parfois, devant le Conseil d’État statuant au contentieux. C’est devant le Conseil d’État siégeant en assemblée générale administrative,