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XIXe siècle, consiste à diviser, au moyen de digues, les plaines a irriguer en bassins dans lesquels l’eau séjourne tout le temps nécessaire à l’humectation du sol. Il n’admet qu’une seule récolte annuelle, consécutive à la crue, et, s’il n’exclut pas complètement le cotonnier et la canne à sucre, il ne permet de tirer qu’un parti médiocre de leur culture.

Le procédé dit de l’irrigation pérenne préserve les terres de l’inondation pendant la crue et donne le moyen de les arroser lorsque le fleuve est à l’étiage, grâce a des canaux, réglés par des réservoirs, des barrages, des vannes, des pompes, puis d’évacuer, au moyen de drains, les eaux devenues inutiles et même nuisibles[1].

Les deux systèmes devront être pratiqués au Soudan en même temps, suivant les régions, la situation, la nature des cultures. Il ne saurait être question en effet de transformer en quelques années, suivant un plan d’ensemble, les immenses superficies susceptibles d’être irriguées. Le budget soudanais dispose de ressources si exiguës que les travaux doivent pour le moment se restreindre à quelques points privilégiés. Ce plan a toutefois été établi. Ce qui a rendu son élaboration plus malaisée, c’est la considération que la quantité de liquide dont dispose l’Égypte doit rester intacte.

Voilà pourquoi le Soudan anglo-égyptien ne dispose pas d’un service spécial d’irrigation, mais dépend à ce point de vue du ministère des Travaux publics égyptien ! Ceux qui ont la charge des irrigations égyptiennes doivent en effet veiller eux-mêmes à ce que les eaux soudanaises ne soient pas augmentées au détriment des pays situés en aval. Les lourds sacrifices que l’occupation et la mise en valeur du Soudan imposent à l’Égypte ne se justifient que par la nécessité de défendre le bassin d’où la vallée intérieure du Nil tire sa fertilité. Faut-il donc sacrifier l’un à l’autre et interdire au gouvernement de Khartoum de tirer parti du fleuve et de ses affluens ? Nullement, semble-t-il. D’une part, des quantités énormes de liquide se perdent dans les marais des régions méridionales, de telle sorte que le Nil Blanc ne contribue pratiquement en rien à la crue, celle-ci dérivant entièrement du Nil Bleu et de l’Atbara. Eli revanche, l’eau qui traverse le Caire au printemps et au début de l’été est due

  1. Voyez notre article précité sur les Irrigations en Égypte.