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Il ne s’agit donc plus ici de la cause, mais des conséquences de la lutte. Chez les neutres, les ennemis de la France ont essayé de lui créer un mauvais renom. Ils ont voulu persuader à des Espagnols, à des Italiens, que la France était devenue une ennemie de la Foi catholique, et que son triomphe serait un malheur pour l’Eglise. Contre cette mensongère campagne, l’éminent recteur de l’Institut catholique et ses collaborateurs se sont élevés, et le livre qu’ils publient est une décisive réponse, en même temps qu’un bien juste hommage rendu à notre patrie.

Oserai-je dire qu’en pareille matière, ils n’ont pas eu grand’peine à faire triompher la vérité ? Ils sont trop bons Français pour que cette constatation puisse choquer leur amour-propre. Les auteurs malveillans de la campagne menée contre nous n’ont pu réussir qu’auprès d’ignorans dont la France était tout à fait inconnue. Les écrivains qui ont uni leurs talens pour la défendre n’ont pas voulu composer des plaidoyers : ils se contentent, avec une bonne foi et une compétence dont personne ne doute, de montrer par des documens et des faits ce qu’on peut attendre, en 1915, de la France catholique, et de faire connaître l’état d’âme qui règne dans les deux camps.

On me pardonnera, avant de rendre compte d’un livre excellent et opportun, de sortir un peu de mon rôle de critique et d’ajouter au livre une courte préface. On s’est adressé à un vieux député ; comment résisterait-il à la tentation de chercher d’où nous vient le mauvais renom dont les auteurs du livre veulent nous laver ?

Il nous vient de la politique anticléricale, évidemment. Mais cette politique répond-elle à des passions profondes qui régneraient sur les Français, en majorité ? Je ne le crois pas du tout. L’anticléricalisme français est né surtout de l’embarras d’imaginer de nouveaux programmes. La plupart des candidats avaient cru devoir adopter les qualifications de radical, ou radical-socialiste : comment expliquer ces appellations redoutables, alors que leurs idées (je leur rends cette justice) étaient le plus souvent modérées et même timides ? « Le cléricalisme, voilà l’ennemi » a servi d’enseigne à plusieurs générations de candidats. Au fond, aujourd’hui encore, quelle est la différence véritable entre un préfet et son prédécesseur du temps de l’Empire ? C’est que celui d’aujourd’hui a des relations moins distinguées,