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inconcevable. Hertz l’a très explicitement reconnu, et aussi Ludwig Boltzmann ; ni l’un ni l’autre, cependant, n’y a vu un motif suffisant pour refuser le titre d’axiomes aux équations de Maxwell. Or ce n’est pas seulement dans les laboratoires de Physique qu’on trouve des aimans permanens, des pierres d’aimant, des aiguilles, des barreaux, des fers à cheval en acier aimanté ; sur le pont de tout navire, l’habitacle de la boussole en contient ; on en rencontre même parmi les jouets d’enfans ; le sens commun est assurément dans son droit quand il interdit à l’esprit de géométrie d’en nier l’existence.

Des aimans permanens, il s’en trouve aussi dans les instrumens dont usent les physiciens qui, sur le conseil de Hertz, reçoivent les équations de Maxwell comme des ordres, qui soumettent leur raison à ces équations sans examiner les titres d’une telle autorité. A l’aide d’instrumens pourvus d’aimans permanens, ces physiciens exécutent nombre d’expériences ; les résultats de ces expériences sont invoqués par eux lorsque, à quelque cas concret, ils prétendent appliquer les corollaires des équations de Maxwell ; ces résultats leur disent alors quelle valeur il convient d’attribuer à la résistance électrique ou au coefficient d’aimantation. Comment donc peuvent-ils faire usage d’aimans permanens au moment même qu’ils invoquent une doctrine dont les axiomes réputent absurde l’existence d’un semblable corps ?

Une telle inconséquence suit naturellement le défaut d’esprit de finesse. Réduit à ses propres forces, l’esprit géométrique ne saurait jamais appliquer ses déductions aux données de l’expérience. Entre les abstractions que le théoricien considère dans ses raisonnemens et les corps concrets que l’observateur manipule au laboratoire, « est l’esprit de finesse seul qui saisit une analogie et qui établit une correspondance ; le lien entre la Physique théorique et la Physique expérimentale se sent : il ne se conclut pas.

Si une théorie a été composée suivant les lois d’une saine méthode, si l’esprit de géométrie et l’esprit de finesse y ont joué chacun son rôle légitime, la liaison entre les équations qu’analyse l’esprit de géométrie et les faits que constate le sens commun sera aisée et solide ; elle résultera des opérations mêmes par lesquelles l’esprit de finesse a, des enseignemens de l’expérience, tiré les hypothèses qui portent la théorie. Mais si