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dernier lambeau protecteur de calcaire grossier. Au-dessous viennent, en pente plus douce, deux couches de sable englobant un banc d’argile intermédiaire, sur lequel sourdent les eaux souterraines. Peu à peu, aujourd’hui encore, sables et argiles coulent au dehors, entraînant la plate-forme calcaire disloquée. Déjà celle-ci est réduite à 200 mètres en tel point comme la ferme Heurtebise à l’Ouest de Craonne, dont le nom indique assez qu’elle est exposée à tous les vents. L’intérêt militaire de telles positions est aisé à concevoir.

Quand on pénètre plus loin vers l’Ouest dans l’intérieur du massif tertiaire, le changement dans la configuration du sol et dans les aspects pittoresques qu’annonçaient déjà ces lambeaux tertiaires devient définitif. Un autre pays commence. On est sorti maintenant de la Champagne crétacée pour entrer dans la région centrale du Bassin Parisien, où les terrains tertiaires, ailleurs supprimés, subsistent, et ces terrains tertiaires présentent une variété qui tranche sur la monotonie de la plaine champenoise. Au lieu des vastes horizons aux ondulations lentes qui étalaient leurs pauvres blancheurs à peine verdies par une herbe rase et leurs quelques bois malingres, nous trouvons des pays accidentés, où des alternances réitérées de sables, de calcaires et d’argiles provoquent des cultures inégales avec des végétations changeantes. Dès la montagne de Reims, ces côtes ensoleillées du tertiaire portent des vignobles fameux. Dans les parties hautes du pays, vers le Tardenois, les meulières de Brie forment des plateaux boisés et un lit d’argile à leur base entretient un niveau de sources, jalonné souvent par des saules, des aulnes ou des peupliers. L’étage du gypse parisien se traduit par les éboulemens résultant de son exploitation ancienne ou de sa dissolution souterraine. Sur quelques sommets, les sables et grès de l’étage de Fontainebleau, plus souvent sur les plateaux les sables dits de Mortefontaine et de Beauchamp montrent leurs blancs ravinemens et leurs blocs désordonnés au milieu des arbres. Les calcaires grossiers du lutétien donnent des étendues de labours, au-dessous desquels pénètrent les longues galeries des carrières. Enfin, vers la base de la série, l’argile plastique, où l’on exploite parfois les lignites, occupe le fond de la vallée de l’Aisne et la partie Est, la partie humide de la forêt de Compiègne, vers Saint-Jean-aux-Bois ou Pierrefonds.