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les nappes artésiennes de Paris, puis environ 30 mètres d’argiles (gault), auxquelles succèdent les formations dites de la gaize (sorte de roche tendre et légère utilisable en moellons) qui atteignent 100 mètres vers Varennes et Grand-Pré, et enfin quelques rares lambeaux de craie. De ces terrains, les sables et argiles forment la zone basse que suit le cours de l’Aire. Au-dessus se dressent déjà à l’Est quelques pitons isolés qu’un couvercle de gaize a préservés de la destruction : par exemple à Montfaucon, dont le nom seul fait prévoir l’intérêt stratégique ou, plus au Nord, à Andevanne, et au Bois de la Folie.

A l’Ouest de l’Aire, cette formation de gaize prend la prédominance, et ce sont ses masses poreuses qui constituent le sous- sol dans toute la Forêt d’Argonne et les Bois de la Grurie. Des lits de rivière, au fond desquels réapparaissent les argiles du gault imperméables aux eaux, la traversent et constituent les défilés classiques des Islettes et Vienne-le-Château ou de Grand-Pré. La Ghalade et le Four de Paris, dont les noms ont été si souvent prononcés, se trouvent sur le premier de ces passages un peu au Nord des Islettes. Ces bois de l’Argonne, qui avaient déjà joué un rôle important pendant la désastreuse retraite prussienne de 1792, laisseront sans doute également un souvenir pénible à l’armée allemande qui s’y est engagée après la défaite du kronprinz.

Les terrains géologiques que l’on rencontre ensuite vers l’Ouest accusent une transformation nouvelle. Après ces régions accidentées, sinon montagneuses, on entre pour longtemps dans les grands plateaux uniformes de la craie qui composent la Champagne et sur lesquels se trouvent Reims, Suippes, Châlons (avec les Champs Catalauniques au N.-E.), Sommesous, Fère-Champenoise, Arcis-sur-Aube, Méry-sur-Seine : tous noms marqués par des combats. Les champs de bataille de Valmy (à l’Ouest de Sainte-Menehould) et de Vitry-le-François plus au Sud, en marquent à peu près le commencement à l’Est. La limite Ouest en est tracée de Craonne à Reims, Epernay, Sézanne, par la falaise de Champagne qui borde le bastion tertiaire de l’Ile de France.

La Champagne, éternelle route d’invasions, c’est le pays propre aux grands déploiemens de troupes ; c’est le terrain de manœuvres classiques ; c’est le « Camp de Châlons. » Dans ses étendues de craie, les coupures successives de la Seine, de