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les produits alimentaires, puisqu’ils peuvent être destinés à la population civile aussi bien qu’à l’armée. En ce qui concernait la détention de navires américains, elle reconnaissait le droit de visite, mais affirmait que ce droit ne saurait être élargi au point d’entraîner des navires dans les ports d’un État belligérant sur un simple soupçon. Pour les cargaisons envoyées « à ordre » ou sans mention du nom du consignataire, il fallait, disait-elle, fournir la preuve qu’elles avaient une destination hostile, la charge de la preuve incombant aux belligérans.

En même temps, l’effet de cette note se trouvait atténué par une déclaration du président Wilson disant : « Ceux des armateurs américains qui dissimulent de la contrebande de guerre, par exemple sous le nom de coton, ont mis le gouvernement dans un grand embarras. Aussi longtemps qu’il se présentera des cas de cargaisons suspectes du même genre, les soupçons se porteront sur toutes les autres cargaisons, lesquelles, tout naturellement, seront exposées à des perquisitions. »

La question se trouvait nettement posée. Le 10 janvier, sir Edward Grey remit la réponse anglaise, où se trouvaient rappelés quelques-uns des faits très démonstratifs que nous avons énumérés plus haut, notamment la comparaison des exportations américaines et, plus particulièrement, des exportations de cuivre à destination des neutres en 1913 et 1914. « En présence de tels chiffres, ajoutait le gouvernement anglais, il est permis, à bon droit, de supposer que la presque totalité du cuivre expédié récemment dans ces pays n’était pas destinée à leur usage personnel, mais à un belligérant. » Très conciliante pour les objets d’alimentation et pour le coton, la note anglaise remarquait néanmoins que, si le gouvernement britannique accordait trop de facilités aux navires chargés de coton, ceux-ci seraient spécialement choisis pour la contrebande. Enfin, au sujet de l’embargo mis sur les exportations de caoutchouc venant des colonies anglaises, elle cherchait également un moyen de réapprovisionner les États-Unis, sans amener aussitôt d’importantes exportations de caoutchouc entre les États-Unis et l’Allemagne.

En résumé, les deux gouvernemens se sont montrés entièrement d’accord sur les principes du droit international et sur la nécessité d’empêcher la contrebande destinée à l’ennemi, tout en évitant les erreurs et donnant prompte réparation pour