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les plus sûres et les plus régulières, vers la destination allemande déclarée à la douane.

Supposons maintenant qu’un tel procédé n’ait pu être employé et que la contrebande doive partir d’Italie même ; on voit alors intervenir l’armée des agens allemands, qui ont formé à Rome une véritable organisation en relation avec leur ambassade, et ceux-ci, très inventifs, imaginent quelque autre tour. L’un de ces artifices (encore pratiqué couramment, paraît-il, à la fin de novembre) était le suivant. Conformément à la loi italienne, qui défend l’exportation du cuivre en Allemagne, l’agent en question expédiait simplement son métal à Lucerne, avec certificat d’origine et déclaration d’expédition en Suisse. L’envoi de cuivre arrivait à Ponte Chiasso, la station frontière entre l’Italie et la Suisse, muni d’un état civil parfaitement correct, et les autorités douanières italiennes ne pouvaient que laisser passer une marchandise expédiée par un neutre à un neutre. Mais, dans la gare frontière, il existe une zone libre d’une vingtaine de mètres entre la douane italienne et la douane suisse. Cet intervalle était suffisant pour substituer à la déclaration d’expédition en Suisse une déclaration de transit par la Suisse en Allemagne. Quand les autorités helvétiques vérifiaient à leur tour ces papiers, elles se voyaient dans l’impossibilité d’arrêter l’envoi, couvert apparemment par la responsabilité des agens italiens, et devaient le laisser continuer par wagons plombés en Allemagne.

Ce sont là seulement des exemples entre bien d’autres des facilités auxquelles se prête le transit, du moment qu’il existe des Etats neutres à traverser pour arriver à un belligérant dont toutes les influences, les forces et l’argent tendent à favoriser la contrebande. Le mal est difficile, mais non impossible à guérir. Ce qu’exigent très justement les Anglais pour laisser passer une cargaison allant en Italie, c’est que l’envoi soit fait, par navire italien, à une maison connue d’Italie, qui en devient responsable et qu’aucun changement de destination ne puisse, sous aucun prétexte, avoir lieu en cours de route. C’est à peu près exactement ce qu’ont édicté les Italiens, depuis le milieu de novembre et sous de graves sanctions : la marchandise, pour laquelle on aurait manqué à ces prescriptions, devant être immédiatement saisie et vendue en Italie.

Les Etats scandinaves ont pris, de leur côté, des mesures